Mercredi 17 septembre, au lendemain d’une journée de mobilisation syndicale, le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, accompagné d’une délégation, a présenté au premier ministre Sébastien Lecornu une série de demandes budgétaires ambitieuses visant à infléchir le prochain budget national.
Des demandes budgétaires à forte portée politique
Les socialistes demandent une réduction de moitié du montant des économies prévues par le « plan Bayrou », la revalorisation du salaire net des travailleurs les plus modestes, le gel de la réforme des retraites de 2023 et la mise en place d’un plan de soutien aux services publics.
Au-delà de simples correctifs, ces propositions cherchent clairement à donner au budget une orientation nettement plus à gauche que celle portée jusqu’ici. En tant qu’arbitre potentiel du sort du prochain budget, le PS exige, pour renoncer à la censure, « une rupture » avec la politique de l’offre menée sous la présidence d’Emmanuel Macron.
La taxe Zucman, instrument symbolique et litigieux
Parmi les propositions les plus marquantes figure la taxe dite « Zucman » : une contribution de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d’euros, outil de travail compris. Présentée comme un moyen de freiner l’optimisation fiscale et d’instaurer une taxation plus forte des grandes fortunes, cette mesure cristallise déjà les oppositions.
La taxe Zucman, même si elle est menacée par un risque d’inconstitutionnalité, est défendue par les socialistes comme un moyen de répondre au sentiment d’injustice fiscale qui traverse une partie de la société. Les auteurs de la proposition insistent sur la nécessité d’entrer dans l’aride technique budgétaire pour combattre efficacement les abus, plutôt que de se contenter de slogans.
Pressions et oppositions : le cadre politique se durcit
La forte mobilisation du monde patronal et de la droite contre tout impôt frappant les entreprises et les entrepreneurs rend le débat plus tendu. Une partie des milieux d’affaires, exaspérée par le durcissement de l’environnement international et critique envers le monde politique, se montre très hostile à la gauche, qu’elle désigne comme son principal adversaire.
Le texte souligne également que cette hostilité coexiste avec un risque réel pour la démocratie venant, selon l’analyse des auteurs, de l’extrême droite, et non de la gauche. Ce diagnostic alimente les débats internes sur la stratégie à adopter face au gouvernement.
Un poids parlementaire limité mais déterminant
Le groupe socialiste, qui compte 66 députés, joue un rôle clé dans l’équilibre parlementaire et dans l’adoption du budget. Cette position confère au PS la capacité d’exiger des concessions, mais elle expose aussi le parti à des tensions internes.
La tentation de la radicalité — augmenter les enchères puis rompre pour ne pas être associé à un pouvoir impopulaire — demeure présente parmi certains dirigeants. À l’opposé, l’histoire politique du PS conserve des marqueurs d’une « culture du gouvernement » et d’un engagement européen, rappelés par certains responsables comme des éléments de retenue et de responsabilité.
Des voix au sein du parti plaident pour un compromis autour d’exigences fortes. Parmi elles figurent des personnalités telles que l’ancien président de la République François Hollande et Carole Delga, présidente de la région Occitanie. Leur appel au dialogue vise à préserver ce qui peut l’être tout en restant fidèle à des objectifs sociaux.
Enjeux européens et stabilité nationale
Les auteurs insistent sur la dimension européenne de l’instabilité politique française. Ils rappellent que l’immobilisme ou les crises répétées en France peuvent paralyser, par ricochet, l’action européenne à un moment jugé « de grand danger ». Cette considération renforce, selon eux, l’argument en faveur d’un compromis politique prudent.
Dans ce contexte, la responsabilité qui pèse sur le petit groupe socialiste est lourde : il doit concilier pressions internes, attentes populaires et exigences de stabilité institutionnelle. Pour les signataires, le premier ministre doit prendre très au sérieux les propositions socialistes s’il veut sauver une part des marges de manœuvre encore possibles.
Sans trancher entre les options, le document met en lumière la confrontation à venir entre une demande sociale pressante et un monde économique mobilisé contre toute hausse d’impôts, tandis que la question de la taxation des très grandes fortunes promet d’être l’un des points les plus difficiles et déterminants des négociations.