Puisqu’elle est accusée de manquer de transparence, la Mairie de Paris a choisi la stratégie du « tout-ouvrir ». C’est la promesse affichée lors d’une opération de communication lancée jeudi 2 octobre : bulletins de salaire, détails chiffrés des indemnités, tableaux de dépenses et notes de frais — la municipalité assure n’avoir rien épargné à la presse.
Une contre-offensive organisée
Face à une polémique qui dure depuis trois semaines sur les frais de représentation de ses élus, la mairie a voulu prendre l’initiative. Dans le dossier remis aux médias figurent notamment la feuille de paie de la maire, Anne Hidalgo (Parti socialiste), ainsi que le détail des indemnités des élus parisiens, présenté jusqu’à deux chiffres après la virgule.
La communication inclut aussi un tableau récapitulatif des dépenses de représentation de l’ensemble des maires d’arrondissement depuis 2020 et le détail des notes de frais, informations communiquées en exclusivité à Libération, selon la mairie. L’objectif affiché est clair : répondre aux accusations de manque de transparence par une mise à disposition extensive de documents financiers.
Les éléments rendus publics
Les pièces rendues publiques comprennent des données de nature différente. D’un côté, la feuille de paie de la maire, destinée à montrer la transparence sur la rémunération. De l’autre, des fichiers chiffrés et ventilés — indemnités avec précision jusqu’à deux décimales et relevés de dépenses par arrondissement depuis 2020 — conçus pour permettre un examen détaillé des pratiques de représentation.
Selon la municipalité, la compilation couvre la période 2020‑présent et vise à situer les montants dans leur évolution temporelle. La remise de ces documents répond à la contrainte politique : contrer les critiques en fournissant les pièces jugées pertinentes par la ville.
Un contexte politique tendu
La démarche intervient à six mois d’élections municipales que la mairie qualifie de « menaçantes » pour la gauche, en place à Paris depuis 2001. Dans ce calendrier électoral serré, chaque épisode médiatique peut devenir un argument de campagne. La mairie a donc décidé d’adopter une posture offensive afin de maîtriser le récit public sur ces questions financières.
Lors de la réunion de l’exécutif municipal, jeudi matin, Anne Hidalgo a exprimé son mécontentement face au manque de soutien de certains acteurs politiques. Elle a dénoncé, selon la retranscription fournie par la mairie, ce qu’elle considère comme « une attaque concertée et méthodique de la droite ». Cette formulation reflète la lecture politique donnée par la maire à la polémique.
Questions soulevées et limites de la réponse
La publication massive de documents vise à apaiser les critiques, mais elle soulève aussi des questions sur la manière dont ces informations seront analysées et contextualisées par les médias et les citoyens. La disponibilité de nombres précis — par exemple des indemnités affichées à deux décimales — facilite le calcul, mais n’explique pas à elle seule les modalités d’attribution ou les pratiques comparées entre arrondissements.
Par ailleurs, si la mairie met en avant la transparence des pièces communiquées, l’efficacité de cette stratégie dépendra de l’accès complet aux justificatifs et de leur lisibilité pour le grand public. La diffusion à la presse, dont une partie des documents a été transmise en exclusivité à Libération, garantit une couverture médiatique, mais pas nécessairement une compréhension immédiate par tous les citoyens.
Enfin, la portée politique de cette opération reste à mesurer : rendre public un ensemble de documents peut réduire l’opacité apparente, sans pour autant répondre aux critiques sur les pratiques ou conduire à des changements concrets si aucune suite administrative ou politique n’est engagée.
La mairie a choisi la transparence numérique comme riposte. Reste à voir si cette stratégie suffira à éteindre la controverse et à convaincre un électorat préoccupé par la gestion des deniers publics à six mois du scrutin municipal.