Nouvelle histoire de l’extrême droite (dir. Baptiste Roger‑Lacan) : trajectoires, dédiabolisation, radicalisation et enjeux du populisme

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Depuis les années 1980, la progression de l’extrême droite a relancé les recherches — synthétisées dans la Nouvelle histoire de l’extrême droite (dir. Baptiste Roger‑Lacan) — qui explorent la difficulté de la définir, l’impact de la stigmatisation et les stratégies de dédiabolisation ou de radicalisation, tout en ouvrant pistes sur bonapartisme, fascisme et populisme.

Un regain d’attention scientifique depuis les années 1980

À mesure que l’extrême droite progressait dans l’espace politique à partir des années 1980, historiens, sociologues et politistes ont intensifié leurs travaux pour en saisir les origines et les logiques. Ces recherches ont produit un foisonnement de questions et d’approches destinées à décrire une famille politique que l’on croyait parfois marginale ou en déclin.

La parution, sous la direction de Baptiste Roger‑Lacan, de la Nouvelle histoire de l’extrême droite fournit une synthèse collective de ces avancées. Ouvrage collectif et informé, il puise dans « les plus récents acquis de la recherche » pour proposer un panorama des débats et des pistes d’analyse, sans prétendre réduire la complexité d’un phénomène ancien et hétérogène.

Définir l’extrême droite : une double difficulté

La première difficulté est analytique. L’étiquette « extrême droite », apparue sous la plume de Paul Thureau‑Dangin en 1874, recouvre des configurations très diverses au fil du temps. Sur la longue durée, les variations idéologiques, organisationnelles et stratégiques sont telles que la définition se heurte à la multiplicité des formes historiques : mouvements insurrectionnels ou massifs, courants nationalistes, personnalismes autoritaires, constructions partisanes contemporaines.

La seconde difficulté est politique. Apposer l’étiquette fonctionne souvent comme un stigmate et joue un rôle normatif dans les débats publics : l’appartenance à « l’extrême droite » est perçue comme un critère d’exclusion, ce qui place ces forces « hors des limites de ce qui est politiquement acceptable ». Cette conséquence étiologique explique en partie les stratégies de contournement adoptées par certains acteurs qui cherchent à se présenter comme la « vraie droite » ou à effacer les marques d’appartenance au champ extrémiste.

Questions vives et lignes de fracture dans la recherche

Les spécialistes continuent d’interroger des pistes conceptuelles précises : faut‑il penser certains courants comme une forme de bonapartisme radicalisé ? Peut‑on parler d’un « fascisme français » ? Le lepénisme relève‑t‑il du populisme ? Ces interrogations, présentes dans la littérature scientifique, ne sont pas des exercices purement théoriques : elles cherchent à rendre compte de continuités et de ruptures, mais aussi des pratiques politiques et des imaginaires qui traversent la droite radicale.

Autant de questions qui rendent la synthèse indispensable. En regroupant approches historiques, sociologiques et politologiques, la Nouvelle histoire de l’extrême droite offre des cadres d’analyse permettant de confronter les sources et d’évaluer les héritages idéologiques, tout en soulignant les transformations opérées par l’intégration au jeu électoral et par les processus de médiatisation.

Stigmatisation, stratégie et continuité

La stigmatisation, mentionnée plus haut, agit comme un facteur explicatif des comportements politiques observés. Face à la dévalorisation symbolique de l’étiquette, certains acteurs optent pour la dédiabolisation, d’autres pour la radicalisation visible. Le constat, sobrement rappelé dans le texte source, est que ces forces continuent d’exister et d’évoluer : « la montée n’a pas cessé, comme chacun peut le constater », formule qui appelle à considérer l’extrême droite comme un objet politique vivant et changeant.

Le choix d’un parti ou d’un mouvement de se rapprocher ou de se distancier de l’étiquette informe également les analyses sur la stratégie électorale et la quête de respectabilité. La tension entre maintien d’une identité radicale et volonté d’intégration dans l’espace politique ordinaire constitue un des axes majeurs de recherche contemporain.

Apports et limites d’une synthèse collective

Un ouvrage collectif dirigé, comme celui coordonné par Baptiste Roger‑Lacan, a l’avantage de rassembler des regards disciplinaires variés et des entrées thématiques complémentaires. Il permet d’actualiser le panorama des connaissances et d’articuler les débats autour de questions partagées, sans gommer les désaccords méthodologiques ou interprétatifs.

En même temps, toute synthèse reste soumise aux limites inhérentes à son entreprise : l’extrême droite, par sa diversité historique et géographique, échappe aux recensements définitifs. La valeur d’un tel livre tient donc moins à la fourniture d’une définition unique qu’à la capacité d’éclairer les contours, les dynamiques et les questionnements qui structurent aujourd’hui l’étude d’un phénomène politique encore en mutation.

Les débats mentionnés — bonapartisme, fascisme national, lepénisme et populisme — doivent être appréhendés comme des pistes d’analyse ouvertes, susceptibles d’évoluer au gré des recherches futures et des transformations du paysage politique.

Parlons Politique

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