L’agence de notation S&P (anciennement Standard and Poor’s) a annoncé, vendredi 17 octobre, l’abaissement de la note souveraine de la France, qui passe de AA− à A+. Ce déclassement fait reculer la France de la quatrième à la cinquième meilleure note selon l’échelle de l’agence.
Un calendrier modifié par la crise politique
La décision, attendue par les marchés, est survenue bien plus tôt que prévu : S&P devait initialement se prononcer le 28 novembre. L’agence explique qu’elle a avancé son calendrier en raison de l’évolution politique récente. « Les raisons de cette déviation [du calendrier] sont la série de récentes motions de censure au Parlement, limitant les progrès pour consolider les finances publiques de la France. »
Pour S&P, la succession d’événements parlementaires et la polarisation politique liée à l’élection présidentielle à venir réduisent les perspectives d’un retour rapide à la stabilité budgétaire. L’agence met en avant que ces tensions rendent incertaine la mise en œuvre de mesures de consolidation dans un horizon proche.
Un constat sévère sur l’instabilité politique
Dans son analyse, S&P porte un jugement tranché sur la situation institutionnelle. « La France connaît l’instabilité la plus sévère [en la matière] depuis la création de la Ve République, en 1958. Depuis mai 2022, Emmanuel Macron a connu deux Parlements sans majorité et une fragmentation politique qui s’intensifie, qui ont mené à six premiers ministres en trois ans. »
L’agence relie directement cet affaiblissement politique à des risques accrus pour la conduite des politiques publiques. Elle cite notamment la suspension de la réforme des retraites décidée par le nouveau gouvernement comme exemple de renversement de priorités susceptibles d’alourdir les finances publiques.
Des projections budgétaires plus pessimistes que l’exécutif
S&P se montre sceptique quant aux engagements du gouvernement en matière d’efforts budgétaires. Pour 2025, l’agence estime que le déficit annoncé par Bercy à 5,4 % du produit intérieur brut (PIB) devrait être respecté. En revanche, elle anticipe un déficit de 5,3 % du PIB pour 2026, sensiblement au‑dessous de l’objectif gouvernemental fixé à 4,7 %.
Sur la dette, l’agence rappelle qu’elle s’élevait à 112 % du PIB fin 2024 et anticipe une hausse à 121 % du PIB d’ici à la fin 2028. Ces trajectoires reflètent, selon S&P, l’effet cumulé d’un déficit persistant et d’un contexte politique qui, selon elle, limite la capacité d’action pour réduire l’endettement.
Les chiffres fournis par l’agence traduisent une lecture plus prudente que celle du gouvernement sur la trajectoire des finances publiques. S&P tente ainsi d’intégrer dans sa notation le risque politique et ses conséquences économiques à moyen terme.
Le passage d’AA− à A+ a des implications symboliques et financières : il signale une moindre marge de sécurité aux investisseurs et peut, à terme, influencer le coût d’emprunt de l’État. L’agence n’a pas modifié immédiatement sa perspective à long terme dans la communication citée, mais la dégradation elle‑même reflète un changement d’appréciation sur la capacité de la France à stabiliser ses comptes.
Les autorités françaises et les acteurs économiques suivront désormais les évolutions parlementaires et budgétaires à court terme, sachant que S&P a explicitement lié le timing de sa décision aux événements politiques récents et à la suspension de réformes annoncée par l’exécutif.
Sans prononcer de jugement sur la validité des projections, le rapport de S&P souligne l’interaction entre instabilité politique et trajectoires budgétaires, et illustre comment les agences de notation intègrent des facteurs institutionnels dans leur évaluation du risque souverain.