Dans la salle de l’Horloge du Grand Commun, annexe du château de Versailles, la tension était contenue mais palpable. Autour d’un café ou d’un bol de petit‑lait, les présidents de région ont assisté à une intervention franche de Valérie Pécresse, présidente (Les Républicains) du conseil régional d’Île‑de‑France. Sa remarque — « Je ne comprends pas pourquoi vous ne nous calculez pas… » — a résumé un ras‑le‑bol envers l’exécutif central et ouvert la séance sur un ton direct.
La prise de parole de Valérie Pécresse
Valérie Pécresse n’a pas atténué sa critique. Elle a dénoncé, en des termes nets, la place actuelle des régions dans les politiques publiques : « les régions sont niées. On a le sentiment que l’on gêne. Si on était préfet de région, on serait mieux traité », a‑t‑elle lancé face au premier ministre, Sébastien Lecornu, qui l’écoutait avec gravité.
Ce passage, prononcé devant ses pairs, visait à souligner une frustration récurrente : les collectivités régionales estiment avoir un rôle important à jouer mais se sentent parfois mises à l’écart. L’image de la « non‑prise en compte » a été choisie pour frapper les esprits et appeler à une reconnaissance institutionnelle plus nette.
Sur le plan formel, la scène a mêlé fermeté et rituel. Les participants, venus pour le congrès annuel des régions, suivaient la discussion depuis des chaises disposées dans la salle historique, certains en sirotant leur boisson. Le contraste entre le décor solennel du Grand Commun et la langue familière employée par Mme Pécresse a renforcé le caractère marquant de son intervention.
La méthode revendiquée par le gouvernement
Le premier ministre, présent à cette réunion de travail organisée à l’occasion du congrès, avait lui‑même voulu montrer qu’il prenait les présidents de région en considération. Selon son entourage, il a choisi d’éviter « un grand discours vertical » pour privilégier « une méthode horizontale, pragmatique et collégiale ».
Plutôt que d’opposer un exposé solennel à l’assemblée, le chef du gouvernement, entouré de cinq ministres, a proposé un format de discussion destiné à favoriser l’échange et la confrontation des points de vue. Cette approche a pour objet de permettre aux élus régionaux de s’exprimer longuement et d’être entendus sur des sujets concrets, selon les termes rapportés par l’entourage du premier ministre.
Le déroulé a pris la forme d’une réunion de travail d’environ deux heures et quart, un temps d’échange que certains présidents ont salué comme inédit comparé à des rendez‑vous précédents qu’ils jugeaient davantage cérémoniels.
Les réactions des présidents de région
La méthode a trouvé des échos favorables chez plusieurs élus présents. Franck Leroy, président divers droite de la région Grand‑Est, s’est montré satisfait de cette approche. Il a déclaré que, jusqu’ici, « on avait des premiers ministres qui venaient faire un show. Lui nous propose deux heures et quart de réunion de travail, donc on va pouvoir tout se dire, et il va en sortir quelque chose », qualifiant Sébastien Lecornu d’« homme de dialogue ».
Ces propos traduisent une attente partagée : au‑delà des gestes symboliques, les présidents de région attendent des mesures concrètes et des formes de coopération plus régulières avec l’État. La durée et le format de la réunion ont été interprétés comme une volonté d’écoute, au moins sur la forme.
Cependant, la tirade de Mme Pécresse rappelle que l’écoute ne suffit pas toujours à dissiper le sentiment de marginalisation. Pour plusieurs élus, la reconnaissance se mesure aussi aux actes — à la manière dont les propositions régionales sont intégrées dans les décisions nationales et aux moyens alloués pour les mettre en œuvre.
Ambiance et portée politique
La tenue de cette rencontre lors du congrès annuel des régions a offert un décor propice aux échanges directs entre le gouvernement et les collectivités territoriales. L’atmosphère mêlait courtoisie protocolaire et fermeté politique : des scènes de convivialité, comme la consommation d’un café, cotoyaient des interventions parfois vives et ciblées.
Si la réunion a été conçue comme une réponse formelle au malaise exprimé par certains présidents, elle ouvre surtout une nouvelle étape de dialogue institutionnel. Reste à mesurer, dans les jours et semaines à venir, si les engagements pris lors de ces deux heures et quart se traduiront par des initiatives concrètes répondant aux griefs exprimés.
En l’état, la séquence a permis de rendre visibles des tensions et des attentes. Elle a aussi montré la volonté du gouvernement, selon ses propres termes, d’adopter un format moins spectaculaire et davantage orienté vers l’échange. Les réactions des présidents présents montrent qu’un geste d’écoute est apprécié, mais que les collectivités chercheront à vérifier la substance des engagements qui en découleront.





