Les députés ont franchi une première étape à l’Assemblée nationale samedi 8 novembre en adoptant, de justesse, la partie « recettes » du projet de budget de la Sécurité sociale, largement remaniée. Ce scrutin ouvre la voie à l’examen de la partie « dépenses », qui contient notamment l’article majeur visant à suspendre la réforme des retraites de 2023.
Un vote serré qui permet la suite des débats
Le texte « recettes » a été approuvé par 176 voix pour, 161 contre et 58 abstentions. Son rejet aurait immédiatement interrompu les débats et envoyé le projet au Sénat dans sa version initiale, privant l’Assemblée de la possibilité de poursuivre l’examen de la partie « dépenses ».
La division a traversé la majorité : les groupes Renaissance et MoDem ont voté pour, Horizons s’est partagé entre pour et abstentions, tandis que Les Républicains se sont abstenus. Le Rassemblement national a voté contre l’ensemble du volet « recettes », dénonçant la réintégration d’un impôt de production (la C3S) que l’Assemblée avait supprimé jeudi.
Selon Amélie de Montchalin, la remise en place de cette C3S visait à éviter un trou estimé à « cinq milliards » d’euros dans les comptes. Le RN a pour sa part considéré que la suppression de cet impôt aurait été « la seule mesure qui aurait pu rééquilibrer la copie finale ».
Positions et tensions à gauche
À gauche, les divisions ont été marquées. La France Insoumise a assumé son vote contre : « nous ne sommes pas d’accord », a déclaré Hadrien Clouet. Jean-Luc Mélenchon a dénoncé le fait que le RN et LFI aient, selon lui, « fait le jeu du pire ».
Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a critiqué cette posture, tandis que le groupe socialiste a majoritairement voté pour, expliquant avoir approuvé ce volet « pour la poursuite du débat ». Les écologistes et les communistes se sont montrés partagés, oscillant entre pour, contre et abstentions.
Sur le fond, l’Assemblée a retiré un grand nombre de mesures proposées par l’exécutif : la surtaxe sur les complémentaires santé, une cotisation patronale sur les titres-restaurant et la suppression d’une exonération sur les salaires des apprentis ont été écartées. La gauche a aussi fait adopter des amendements prévoyant une hausse de la CSG sur les revenus du patrimoine, qui est évaluée à 2,8 milliards d’euros de recettes.
La suite : examen de la partie « dépenses » et sujets sensibles
Les débats sur la partie « dépenses » doivent se tenir jusque mercredi, avec une interruption liée à l’Armistice du 11-Novembre. L’article phare tendant à suspendre la réforme des retraites de 2023 est programmé pour être examiné mercredi peu après 15 heures ; le gouvernement a choisi ce créneau pour limiter le risque d’un débat nocturne.
Les tensions devraient se concentrer sur plusieurs sujets sensibles déjà apparents. L’Assemblée a supprimé, dès le début de l’examen samedi soir, l’élargissement prévu des participations forfaitaires et franchises aux consultations chez le dentiste et à certains dispositifs médicaux.
Un débat parallèle porte sur le doublement, par décret et en dehors du budget de la Sécurité sociale, des franchises médicales afin de récupérer 2,3 milliards d’euros. Une large part de l’hémicycle presse le gouvernement de renoncer à cette option, qui pèserait sur les patients.
Le projet de budget tablait sur un déficit de la Sécurité sociale de 17,5 milliards d’euros en 2026, contre 23 milliards en 2025. La ministre a insisté sur la nécessité que le déficit ne soit « pas supérieur à 20 milliards d’euros ». Le rapporteur général du budget, Thibault Bazin, a alerté que les choix retenus sur les recettes porteraient, à ce stade, le déficit à « 20,6 milliards ».
Après le vote de samedi, le premier ministre Sébastien Lecornu a réagi : « Plus que jamais, le gouvernement se tient à disposition des députés et sénateurs pour la suite des débats. »
Les parlementaires devront maintenir un rythme soutenu pour respecter les délais constitutionnels : un retard entraînerait l’envoi du texte au Sénat sans vote final de l’Assemblée, ce qui modifierait sensiblement la phase suivante de la navette parlementaire.





