Backlash écologique : comment lobbies pétroliers et industriels orchestrent un contre‑mouvement pour discréditer et démanteler la transition écologique

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Backlash écologique (ou « green backlash ») : alors que l’urgence climatique s’accentue, des groupes industriels et pétroliers orchestrent un contre‑mouvement structuré — campagnes d’opinion, stratégies juridiques et lobbying — pour démanteler régulations et discréditer la transition écologique. Le livre Greenbacklash. Qui veut la peau de l’écologie ? retrace ces tactiques historiques et contemporaines et appelle à une vigilance renforcée face à l’influence économique sur les politiques environnementales.

Un constat contre‑intuitif

Alors que le réchauffement climatique et ses effets s’accélèrent, plusieurs observateurs notent un phénomène paradoxal : la répression des défenseurs de l’environnement se renforce et des dispositifs de régulation écologique sont détricotés, tant en Europe qu’aux États‑Unis.

Pour désigner ce recul, une expression s’est imposée — « backlash écologique » ou green backlash (littéralement « retour de bâton vert ») — qui rend compte, selon des chercheurs, d’un mouvement plus profond qu’une simple crise passagère.

Origines et usages du terme

L’expression « backlash écologique » (ecological backlash) apparaît dès 1970 dans le New York Times, présentée alors comme une éventualité peu probable à une époque que l’historien Jean‑Baptiste Fressoz décrit comme « l’apogée de l’écologie politique aux États‑Unis ». Cette mention historique souligne qu’une prise de conscience sur la pollution et ses ravages était déjà à l’œuvre au tournant des années 1960‑1970.

Le livre Greenbacklash. Qui veut la peau de l’écologie ? (Seuil, 320 pages, 23 euros), coordonné par des spécialistes du sujet, rassemble des analyses qui cherchent à préciser les origines et les contours de ce phénomène. Jean‑Baptiste Fressoz y intervient pour replacer la notion dans son contexte historique.

Une dynamique alimentée par des intérêts économiques

Des chercheurs cités dans l’ouvrage estiment que le backlash écologique est porté par des groupes d’intérêt économiques puissants. L’argument central est que, dès l’apparition des premières réponses institutionnelles aux constats scientifiques, des acteurs industriels et pétroliers se sont organisés pour contrer des mesures qui menaçaient leurs intérêts, explique l’historienne Laure Teulières, codirectrice de l’ouvrage.

« Dès que commencent à se déployer les premières réponses institutionnelles aux constats scientifiques, des groupes d’intérêt pétroliers et industriels s’organisent contre ces mesures qui viennent contrecarrer leurs intérêts propres », écrit‑elle. Les stratégies de ces acteurs, notent les contributeurs, ont évolué et se sont durcies au fil du temps, empruntant des techniques et une rhétorique déjà rodées par les lobbys du tabac.

Plus qu’un simple recul : un mouvement structuré

Les auteurs distinguent le backlash écologique d’un simple reflux passager. Ils décrivent un processus structuré et durable : des campagnes publiques, des stratégies juridiques, et des réseaux d’influence qui visent à affaiblir la régulation environnementale et à discréditer les acteurs de la transition écologique. Selon eux, ce mouvement se renforce à mesure que la catastrophe écologique s’accélère et que l’urgence d’agir devient de plus en plus évidente.

Cette analyse met en lumière une ironie politique et sociale : l’intensification des effets environnementaux coexiste avec des contre‑mouvements organisés visant à retarder ou limiter les réponses réglementaires et sociales.

Retour sur quelques précédents historiques

Le constat historique aide à comprendre la permanence de ces mécanismes. À la fin des années 1960 et au début des années 1970, la montée des préoccupations environnementales n’a pas empêché des attaques personnelles et idéologiques contre des figures marquantes du mouvement écologique. L’exemple souvent cité est celui de Rachel Carson, auteure de Printemps silencieux (Plon, 1962), qui fut l’objet, alors qu’elle dénonçait le rôle des pesticides dans le déclin des oiseaux, d’accusations de nature sexiste la présentant comme trop émotive ou « hystérique ».

Ce type d’attaques, soulignent les contributeurs du volume, illustre des tactiques de discrédit qui peuvent accompagner des campagnes plus larges visant à freiner l’avancée des politiques écologiques.

Enjeu contemporain et questionnements

Les chercheurs réunis dans Greenbacklash invitent à considérer le backlash écologique non pas comme un effacement accidentel des progrès, mais comme une réaction organisée à la montée des régulations et à la prise de conscience publique. Ils appellent à une meilleure compréhension des acteurs, des moyens et des récits employés pour contrer les politiques environnementales.

Le diagnostic posé par l’ouvrage — et rappelé par les historiens cités — encourage à suivre de près tant l’évolution des stratégies d’influence que les réponses institutionnelles et citoyennes. Les éléments historiques et les constats contemporains convergent pour montrer que le débat autour de l’écologie engage des enjeux économiques, politiques et culturels qui dépassent le simple cadre réglementaire.

Reste que, comme le soulignent les contributeurs, préciser la portée exacte et les modalités concrètes de ce « backlash » demande des travaux approfondis et une vigilance continue sur les pratiques de lobbying, les campagnes d’opinion et les évolutions législatives.

Parlons Politique

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