Mercredi, trois députés du Rassemblement national se sont rendus sur le campus de Villetaneuse (Seine-Saint-Denis) pour, selon eux, « vérifier sur place (…) l’entrisme islamiste ». Les images de cette visite ont été publiées sur leurs comptes X et ont rapidement suscité une réaction des acteurs universitaires.
Les faits rapportés par les élus
Les députés Julien Odoul (Yonne), Philippe Ballard (Oise) et Laurent Jacobelli (Moselle) ont diffusé des vidéos et des commentaires affirmant avoir constaté, sur le campus, des signes d’une présence musulmane organisée et des manifestations idéologiques hostiles. Sur X, Laurent Jacobelli a déclaré avoir « constaté (…) une omniprésence du voile islamique, des couloirs tapissés d’affiches d’extrême gauche appelant à la violence, et des insultes proférées par des étudiants militants totalement acquis aux thèses de La France insoumise ».
Julien Odoul, présent sur place, a répondu aux questions du site Boulevard Voltaire. Les trois députés se réfèrent aussi à un article de l’hebdomadaire Valeurs actuelles daté du 17 octobre, qui présentait le campus comme « le temple du communautarisme musulman ». Dans leurs publications, ils présentent leur visite comme une vérification de ces allégations.
La riposte de l’université et de l’association France Universités
La présidence de Sorbonne Paris Nord a condamné « avec la plus grande fermeté » cette intervention, qualifiée d’« intrusion » et d’« inacceptable », sur son site Internet. L’université affirme que les élus et des journalistes ont pénétré sur le campus « sans aucune autorisation préalable » et que des « captations vidéos » ont été réalisées « sans consentement ».
France Universités, association qui réunit 75 présidents d’universités et d’écoles publiques d’enseignement supérieur, a publié jeudi 27 novembre une plainte formelle contre cette « intrusion (…) inacceptable ». L’association a dénoncé « une nouvelle instrumentalisation de l’université » et a apporté « son plein soutien » à la présidente visée par l’incident.
La présidence de Sorbonne Paris Nord rappelle, dans son communiqué, le cadre légal qui protège le droit à l’image et revendique ses compétences de « police administrative visant à garantir la sécurité, le bon ordre et la sérénité des activités universitaires ».
Des revendications opposées
Du côté des élus, la visite s’inscrit dans une logique de mise en lumière d’un problème qu’ils estiment sous-évalué ou ignoré. Ils présentent des éléments filmés et des observations de terrain comme preuve d’une situation problématique.
Pour l’université, ces éléments forment au contraire une mise en scène. Dans son message public, la présidence affirme que « cette intrusion intervient dans un contexte où certains médias présentent notre université comme un espace livré à des logiques identitaires. Ces mises en scène construisent une image déformée, éloignée des réalités de nos campus ».
Sorbonne Paris Nord précise accueillir 26 000 étudiants et souligne que « la diversité sociale, culturelle et intellectuelle qui traverse notre établissement est une force ». L’université oppose ainsi à la lecture des députés une représentation plus large et plurielle de sa population étudiante.
Enjeux et conséquences
L’incident met en lumière la tension entre liberté d’informer et respect des règles de fonctionnement des établissements scolaires et universitaires. Les actions de députés accompagnés de médias sur des campus posent des questions juridiques et déontologiques, notamment sur la nécessité d’une autorisation préalable et sur le droit à l’image des personnes filmées.
À ce stade, les déclarations publiées par les élus et la réaction de l’université exposent des versions concurrentes des mêmes faits. Les vidéos mises en ligne par les députés documentent une partie de l’événement, mais l’université conteste leur portée et la manière dont elles ont été obtenues.
Les positions restent opposées : d’un côté, des parlementaires dénoncent ce qu’ils perçoivent comme des dérives identitaires ; de l’autre, l’institution universitaire dénonce une instrumentalisation médiatique et rappelle la diversité et le cadre légal qui régissent la vie sur ses campus.




