Le chef du parti Les Républicains, Bruno Retailleau, a relancé, mercredi 3 décembre, la controverse autour d’un éventuel recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter les projets de loi de finances — ceux de la Sécurité sociale et de l’État. Ce procédé, qui permet au gouvernement de faire passer un texte sans vote si aucune motion de censure n’est déposée ou adoptée, divise l’exécutif et sa majorité.
Un appel clair à « assumer » l’usage du 49.3
Interrogé sur Sud Radio, Bruno Retailleau a demandé que le premier ministre, Sébastien Lecornu, « assume » l’usage du 49.3. « Il faut l’assumer. (…) Je suis persuadé que jamais les socialistes ne voteraient une censure. Donc, pourquoi n’utilise‑t‑il pas ce que la Constitution lui permet de faire pour avoir un budget conforme aux intérêts de la nation ? » a‑t‑il déclaré.
Plusieurs personnalités de la majorité — et au‑delà — ont exprimé des positions proches. Le patron d’Horizons, Édouard Philippe, et le président du groupe MoDem, Marc Fesneau, ont estimé qu’un recours au 49.3 resterait la solution la plus directe pour sortir de l’impasse budgétaire. Selon les propos rapportés, Marc Fesneau a résumé l’argument en ces termes : « La meilleure solution reste le 49.3, car personne ne veut assumer ce budget. »
La réponse du gouvernement et le maintien du calendrier parlementaire
Face à ces pressions, la porte‑parole du gouvernement, Maud Bregeon, a réaffirmé sur BFM‑TV la volonté de l’exécutif de ne pas recourir au 49.3. Elle a rappelé que le gouvernement s’était engagé à « ne pas l’utiliser » et estimé qu’y recourir reviendrait « à acter l’échec des discussions parlementaires ».
« C’est un peu facile » de suggérer l’emploi du 49.3, a‑t‑elle ajouté, en renvoyant la responsabilité du débat aux groupes parlementaires : « Pourquoi est‑ce que nous aurions peur du débat parlementaire ? Bruno Retailleau a des députés, il faut laisser le débat se tenir. »
Maud Bregeon a également souhaité que la procédure aille « au bout » et maintenu la date du vote solennel sur le projet de budget de la Sécurité sociale, prévue mardi 9 décembre. Elle a présenté cette journée comme un moment décisif : « Ce sera une journée importante, et les uns et les autres pourront prendre position. Puis les Français regarderont qui a choisi la réduction du déficit et qui a refusé d’avancer vers un budget. »
Une impasse aux conséquences financières concrètes
Les débats portent sur deux textes distincts mais corrélés : le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026, dont l’adoption apparaît « très incertaine », et le projet de budget de l’État, pour lesquels des compromis restent à trouver à gauche et au sein de la coalition gouvernementale.
Le ministre du Travail, Jean‑Pierre Farandou, a alerté les députés sur les conséquences d’un rejet : « Il n’y a pas de plan B, pas de loi spéciale pour la Sécurité sociale. » Le gouvernement a chiffré le risque d’un creusement du déficit de la Sécurité sociale jusqu’à 30 milliards d’euros en l’absence d’un budget voté d’ici la fin de l’année.
Un rejet du texte constituerait un revers majeur pour le premier ministre et réduirait fortement les chances d’adopter un budget de la Sécurité sociale avant le 31 décembre, date limite mentionnée par l’exécutif.
Positions divergentes au sein de la majorité et du PS
La situation illustre les tensions internes : certains ténors de la majorité réclament le 49.3 pour sortir de l’impasse, alors que le gouvernement maintient son choix de privilégier le débat parlementaire. Quelques députés socialistes, mentionnés dans les échanges publics, ont également fait part de voix favorables ponctuellement à l’usage de cet outil constitutionnel pour débloquer la situation, ce qui complique encore la lecture des équilibres au Palais‑Bourbon.
Dans ce contexte, l’issue du vote solennel du 9 décembre apparaîtra comme un test politique et parlementaire. Le gouvernement mise sur la tenue du débat et sur la responsabilité des groupes pour aboutir à un texte adopté sans recourir au 49.3. Les opposants à ce choix jugent, eux, que l’obstacle politique est trop important et que seule une décision exécutive permettrait d’éviter un blocage financier.
La semaine du vote sera ainsi scrutée pour mesurer la capacité de la majorité à s’unir autour d’un consensus budgétaire et pour évaluer les conséquences pratiques, tant financières que politiques, d’un éventuel rejet des textes présentés.





