Le président du Sénat (Les Républicains), Gérard Larcher, a de nouveau appelé Sébastien Lecornu à « envisager le 49.3 » pour « donner un budget à la France », dans un entretien au Figaro publié mercredi 3 décembre. Il a défendu l’usage de cet article de la Constitution comme un « outil » légitime : « Une arme constitutionnelle n’est pas une arme contre la démocratie parlementaire, car la démocratie parlementaire s’est exprimée. Je préfère clairement le 49.3 aux ordonnances ou la loi spéciale. »
La droite met la pression
Ces déclarations interviennent alors que le Sénat, majoritairement de droite, durcit l’examen des textes budgétaires et rejette plusieurs compromis proposés par l’exécutif. Gérard Larcher a regretté la méthode du « locataire de Matignon », estimant que « Le premier ministre ne nous a pas consultés pour abandonner le 49.3 ni pour abandonner la réforme des retraites. »
Le président des Républicains, Bruno Retailleau, a fait écho à cet appel le même jour, demandant à Sébastien Lecornu « d’assumer » le recours à l’article 49.3 pour faire passer les budgets de la Sécurité sociale et de l’État. « Je suis persuadé que jamais les socialistes ne voteraient une censure. Donc pourquoi n’utilise-t-il pas ce que la Constitution lui permet de faire pour avoir un budget conforme aux intérêts de la nation ? » a-t-il déclaré sur Sud Radio.
Plusieurs responsables politiques de la majorité et de la droite modérée ont exprimé la même préférence. Edouard Philippe (patron d’Horizons) et Marc Fesneau (président du groupe MoDem) ont estimé que « la meilleure solution reste le 49.3 », Fesneau ajoutant que « personne ne veut assumer ce budget ». Hervé Marseille, chef de file des sénateurs centristes (UDI), a jugé que reprendre le 49.3 « ça serait un soulagement pour tout le monde ».
Le gouvernement maintient son refus
Face à ces pressions, l’exécutif reste ferme. Sébastien Lecornu, selon le compte rendu, a réitéré devant les députés son engagement initial : « Il n’y aura pas d’utilisation du 49.3 de la Constitution et d’engagement de la responsabilité du gouvernement. »
La porte-parole du gouvernement a rappelé la même position sur BFM-TV : « On s’est engagé à ne pas l’utiliser, nous n’utiliserons pas le 49.3 », ajoutant que recourir à cet article reviendrait « à acter l’échec des discussions parlementaires ». Elle a estimé qu’il était « un peu facile » de proposer cette solution et a invité à « laisser le débat se tenir ».
La porte-parole a confirmé la volonté du gouvernement d’aller « au bout » de la procédure parlementaire et maintenu la date prévue pour le vote solennel du projet de budget de la Sécurité sociale : mardi 9 décembre. « Ce sera une journée importante, et les uns et les autres pourront prendre position. Puis les Français regarderont qui a choisi la réduction du déficit et qui a refusé d’avancer vers un budget », a-t-elle déclaré.
Enjeux et conséquences financières
Le calendrier et l’issue des votes demeurent incertains. Les députés ont repris l’examen du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026, mais les compromis restent difficiles à trouver, en particulier avec la gauche. Le texte de l’État suscite également peu de consensus.
Le gouvernement avertit des risques en cas d’absence d’adoption : le ministre du travail, Jean-Pierre Farandou, a affirmé devant les députés qu’il n’existait « pas de plan B, pas de loi spéciale pour la Sécurité sociale ». Il a mis en garde contre une montée du déficit, évaluée par l’exécutif à « jusqu’à 30 milliards d’euros » en l’absence de budget adopté.
Face à ces enjeux, la tension politique se concentre sur la capacité de la majorité à discipliner ses élus et sur la volonté du chef du gouvernement de tenir sa promesse de ne pas recourir au 49.3. Si le texte fosse rejeté, cela constituerait un revers majeur pour l’exécutif et réduirait fortement les chances d’adopter un budget de la Sécurité sociale avant le 31 décembre.
La situation reste donc suspendue aux prochains votes et aux arbitrages politiques entre majorité, opposition et chambres, avec en filigrane la question de l’usage d’un instrument constitutionnel potentiellement décisif pour boucler les comptes publics.





