Trois mois après la levée à Paris d’un contrôle judiciaire qui lui interdisait de revenir sur le Caillou, Christian Tein, président du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), est arrivé en Nouvelle-Calédonie, jeudi 4 décembre. Son avion a atterri à 16 heures (6 heures à Paris) à l’aéroport de Nouméa‑La Tontouta.
Le dirigeant indépendantiste est monté sans un mot dans une voiture en direction de Saint‑Louis, fief kanak de l’agglomération de Nouméa, où il réside, selon un récit transmis à l’AFP.
Arrivée sous haute tension et préoccupations pour sa sécurité
Le retour de M. Tein suscite des inquiétudes sur sa sécurité. « Nous craignons pour sa sécurité », a déclaré à l’Agence France‑Presse Henri Juni, membre du bureau politique du FLNKS, en dénonçant des messages « racistes et haineux » relayés sur les réseaux sociaux.
L’AFP a indiqué avoir consulté de nombreux commentaires hostiles en ligne, dont certains invitant à « avoir des yeux dans le dos » à l’encontre de Christian Tein. Ces messages alimentent un climat tendu autour de son retour.
Un parcours judiciaire encore en cours
Christian Tein avait été interpellé en juin 2024 et placé en détention provisoire. Il avait alors été transféré immédiatement vers l’Hexagone, avec six autres militants, à bord d’un avion spécialement affrété, d’après les informations rapportées.
Si son contrôle judiciaire a été levé en septembre, autorisant son retour, il demeure mis en examen pour des faits qualifiés de vols en bande organisée avec arme, destructions en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de la préparation de crimes et délits.
Durant sa détention à Mulhouse, M. Tein a été désigné président du FLNKS, nomination qui divise toujours. Pour ses partisans, il était un prisonnier politique ; pour ses détracteurs, il reste le meneur des émeutes de mai 2024, certains responsables politiques locaux allant jusqu’à le qualifier de « terroriste ».
Une pétition en ligne demandant qu’il ne remette pas les pieds en Nouvelle‑Calédonie a recueilli plus de 13 000 signatures, signe de l’indignation d’une partie de l’opinion publique locale.
Contexte politique et conséquences des émeutes
L’archipel calédonien reste profondément divisé, un an et demi après la contestation d’une réforme électorale controversée qui a dégénéré en émeutes. Ces violences ont causé officiellement 14 morts et provoqué des dégâts estimés à plus de 2 milliards d’euros.
Le retour de Christian Tein intervient dans ce contexte de fracture sociale et politique. Ses partisans y voient une étape du combat indépendantiste ; ses opposants redoutent une nouvelle montée des tensions.
« Je suis heureux pour mon frère, qui a passé un an en prison à 17 000 kilomètres de chez lui, alors qu’il n’avait jamais mis les pieds en métropole », a déclaré Désiré Tein, présent à l’aéroport.
Il a ajouté : « J’ai demandé au haut‑commissariat à ce qu’il bénéficie d’une protection, mais je n’ai pas eu de réponse ». Contacté par l’AFP, le haut‑commissariat a, selon l’agence, décliné tout commentaire.
Retour sur la scène politique
Christian Tein fera son retour sur la scène politique à l’occasion d’un congrès extraordinaire du FLNKS, prévu samedi, qui sera son premier en tant que président du mouvement. Ce rendez‑vous interne devrait permettre au FLNKS de préciser sa ligne et d’organiser sa direction après une période de forte turbulence.
Le climat reste cependant fragile. Les autorités locales et les acteurs politiques observent de près l’évolution de la situation, tandis que la population attend des réponses sur la sécurité et la reconstruction après les violences.





