L’ambiance est feutrée, le décor celui du Palais du peuple, au cœur de Pékin, grandiose. Face aux délégations chinoise et française, l’échange entre Xi Jinping et Emmanuel Macron a été marqué, jeudi 4 décembre au matin, par une réplique nette du président chinois : « Nous nous opposons fermement à toute accusation irresponsable et discriminatoire ». Cette phrase, lâchée au deuxième jour de la visite d’État du chef de l’État français, a interrompu la tonalité courtoise des échanges protocolaire.
Une saillie révélatrice des désaccords
La remarque de Xi Jinping survient au terme d’un long entretien en tête-à-tête entre les deux présidents. Elle illustre, selon les observateurs présents, le fossé persistant entre Pékin et les capitales occidentales sur plusieurs dossiers sensibles, et en particulier sur la guerre en Ukraine. Si les deux dirigeants ont affirmé leur attachement au multilatéralisme, soulignant un principe dont les responsables occidentaux s’estiment aujourd’hui privés par certaines politiques internationales, la phrase du dirigeant chinois a été perçue comme une fin de non-recevoir.
Formulée sans concession, la citation de Xi Jinping a mis en lumière une sensibilité particulière de la Chine à toute critique qu’elle jugerait infondée ou discriminatoire. Dans le cadre d’une visite d’État, où les marques de politesse sont codifiées, une telle réplique a pris une résonance d’autant plus forte qu’elle intervient publiquement et devant les délégations.
Les objectifs de la France
Emmanuel Macron revient à Pékin avec un objectif affiché et répétitif : tenter de convaincre son homologue d’exercer une influence sur Vladimir Poutine afin d’obtenir un cessez‑le‑feu, voire un accord de paix. Cette démarche n’est pas nouvelle ; elle avait déjà caractérisé la précédente visite du président français en avril 2023, évoquée par l’entourage officiel. Lors de ces rencontres, Paris mise sur la capacité de la Chine à peser sur Moscou, en tant que partenaire stratégique et interlocuteur majeur sur la scène internationale.
Le choix de renouveler cet appel traduit une urgence diplomatique perçue à Paris. Les combats en Ukraine se poursuivent et la position de la Russie sur le terrain et dans les enceintes diplomatiques est perçue comme s’affirmant, ce qui ajoute de la pression sur les efforts de médiation menés par d’autres acteurs internationaux.
Un environnement diplomatique tendu
La rencontre franco‑chinoise s’inscrit également dans un contexte international agité. À Paris, on juge la période « cruciale » au vu des difficultés rencontrées par la médiation conduite par la Maison Blanche entre Kiev et Moscou. Ce processus rencontre des obstacles et, selon le récit des événements, a été affecté par la rencontre entre Steve Witkoff — qualifié ici d’envoyé spécial de Donald Trump — et le président russe, mardi. Dans ce climat, la marge de manœuvre diplomatique semble limitée.
Les références successives au multilatéralisme, tant par Paris que par Pékin, traduisent un discours commun sur la nécessité d’un cadre international de résolution des conflits. Elles masquent toutefois des interprétations divergentes de ce que ce principe implique concrètement et des responsabilités à assumer pour faire avancer une solution politique.
Conséquences et perspectives
La tonalité de l’échange au Palais du peuple souligne la difficulté pour les pays occidentaux de concilier appels à la responsabilité et réalités des alliances internationales. Pour la France, l’enjeu consiste à maintenir un dialogue ouvert avec la Chine tout en exprimant des demandes jugées essentielles pour la paix en Europe de l’Est. Pour la Chine, la priorité affichée reste la défense de sa souveraineté et la réprobation de ce qu’elle considère comme des accusations injustifiées.
À l’issue de cette journée, la portée exacte des discussions diplomatiques reste mesurée. Les déclarations publiques laissent transparaître les lignes de fracture mais n’indiquent pas, dans l’immédiat, de percée décisive sur le dossier ukrainien. Les observateurs noteront que, malgré les marques de courtoisie et les appels au multilatéralisme, les positions de fond restent éloignées et difficiles à rapprocher à court terme.
Ce nouvel épisode diplomatique entre Paris et Pékin illustre la complexité des relations internationales contemporaines, où convergences rhétoriques et divergences stratégiques coexistent, souvent de manière inconfortable, au lendemain d’échanges publics très codifiés.





