Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, définitivement adopté mardi 16 décembre par l’Assemblée nationale, contient un article qui remanie en profondeur le cumul emploi‑retraite. Peu évoquée dans le débat public, cette disposition a focalisé l’attention en raison des nouvelles règles plus strictes qu’elle instaure, alors que le législateur avait au contraire cherché à encourager ce mécanisme lors de la réforme de 2023.
Qu’est‑ce que le cumul emploi‑retraite et que modifie la loi ?
Le cumul emploi‑retraite permet à un assuré ayant commencé à percevoir sa pension de reprendre une activité professionnelle. Le dispositif vise à développer la présence des seniors sur le marché du travail en offrant une continuité entre pension et rémunération d’emploi.
Le texte distinguait jusqu’ici deux modalités principales. La première autorise le cumul sans plafond des revenus quand la personne a pris sa retraite en ayant droit au taux plein et à l’âge légal prévu pour sa génération (64 ans, à terme, normalement). Dans ce cas, la pension et la rémunération liée à la reprise d’activité peuvent être perçues simultanément, sans limitation de montant.
La seconde modalité, dite « cumul plafonné », s’applique lorsque ces conditions ne sont pas remplies. Dans ce régime, la somme des revenus d’activité et des retraites ne doit pas dépasser un seuil fixé par la réglementation. Par ailleurs, le retour à l’activité chez le dernier employeur est soumis à un délai d’attente de six mois après le versement de la première pension.
Une inflexion par rapport à la réforme de 2023
Ces mesures interviennent après une période où le législateur avait encouragé le recours au cumul emploi‑retraite. La réforme de 2023 avait cherché à faciliter la poursuite d’activité des seniors, en misant sur la flexibilité et l’incitation financière. Le nouvel article du PLFSS pour 2026 marque une inflexion en durcissant certaines conditions d’accès, ce qui a surpris des observateurs compte tenu du positionnement antérieur du gouvernement.
Le débat public sur cette réforme s’est toutefois concentré sur des sujets comme le financement des retraites et l’âge légal, et la refonte du cumul emploi‑retraite a reçu moins d’attention médiatique, malgré son impact potentiel pour de nombreux travailleurs proches de la retraite.
Effets attendus et questions pratiques
En durcissant l’encadrement du cumul, le texte vise implicitement à mieux réguler la combinaison des revenus et la mécaniques des parcours professionnels en fin de carrière. Concrètement, des assurés qui n’atteignent pas le taux plein ou l’âge légal applicable à leur génération pourraient voir leurs possibilités de reprise d’activité limitées par des plafonds ou des contraintes nouvelles.
Plusieurs questions pratiques subsistent pour les personnes concernées : comment seront calculés les plafonds applicables ? Quelles seront les modalités de vérification du droit au taux plein ? Quelle lecture le gouvernement et les caisses de retraite feront‑elles des situations hétérogènes (temps partiel, contrats courts, travail indépendant) ? Le texte adopté fixe le principe d’un encadrement renforcé, mais des précisions réglementaires seront nécessaires pour en définir l’application au quotidien.
Enfin, la clause imposant un délai de six mois après le versement de la première pension pour un retour chez le dernier employeur souligne la volonté de limiter les reprises immédiates d’activité au sein de la même entreprise. Cette règle existe déjà pour certains cas ; elle est ici reconduite ou précisée dans le nouvel article.
Le basculement d’une logique d’incitation vers un encadrement plus strict pourrait avoir des conséquences sur les trajectoires professionnelles des seniors et sur le marché du travail localisé. Mais l’étendue de ces effets dépendra largement des décrets d’application et des adaptations des organismes de retraite.





