Contexte et dispositif adopté
Le Sénat a adopté, dimanche 23 novembre 2025, une disposition visant à encadrer la pratique de la médecine esthétique en la soumettant à une autorisation délivrée par « l’ordre des médecins compétent ». Cette mesure a été votée lors de l’examen en première lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026, dont le parcours législatif reste ouvert et n’est pas encore définitif.
La médecine esthétique — distincte de la chirurgie esthétique — regroupe plusieurs actes non chirurgicaux ou faiblement invasifs, comme les injections de toxine botulique (botox) ou les implants capillaires, cités explicitement dans le texte initial. L’objectif affiché du législateur est de mieux encadrer ces pratiques, en insistant sur la sécurité et la formation des praticiens.
De l’Assemblée nationale au Sénat : deux options d’autorisation
Lors de l’examen du projet de budget à l’Assemblée nationale, un amendement avait prévu de confier la délivrance de l’autorisation à l’Agence régionale de santé (ARS), cette autorisation étant proposée pour une durée de cinq ans renouvelable. Les sénateurs ont toutefois préféré une autre piste : l’attribution de la délivrance à « l’ordre compétent ».
Selon la rapporteure sénatoriale Corinne Imbert, sénatrice apparentée Les Républicains, cette formulation résulte de discussions entre le gouvernement et le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM). La précision donnée par la sénatrice souligne que la rédaction adoptée reflète un compromis issu des échanges entre les parties prenantes.
Conditions de qualification et rôle d’un décret
Le texte adopté au Sénat prévoit qu’un décret viendra préciser les conditions requises pour exercer ces actes. Ce décret définira notamment la « qualification initiale, la formation et l’expérience professionnelle requises ». Il pourra aussi fixer une durée minimale d’exercice préalable en médecine curative avant l’accès à la médecine esthétique.
L’exigence d’une expérience préalable vise explicitement à limiter les départs précoces vers une activité souvent mieux rémunérée. La ministre de la Santé, Stéphanie Rist, a qualifié la mesure de « première pierre » et annoncé la poursuite des travaux sur la qualité, la sécurité, la formation et la régulation de cette spécialité.
Enjeux territoriaux et pénurie médicale
Les auteurs de l’amendement et les parlementaires évoquent également un enjeu de maillage territorial des soins. La sénatrice socialiste Annie Le Houérou a souligné que l’objectif est de « lutter contre la fuite des médecins vers la médecine esthétique ». Elle a ajouté qu’« aucun registre officiel des médecins spécialisés dans les interventions esthétiques n’existe actuellement et cela mine le maillage territorial de notre système de soins ».
La mention d’un registre manquant renvoie à une difficulté de connaissance : sans fichier officiel, il est plus difficile d’évaluer précisément l’ampleur du phénomène et ses effets sur l’offre de soins dans les territoires.
Estimation du nombre de praticiens et limites
Le Conseil national de l’ordre des médecins estime qu’environ 10 000 médecins pratiqueraient la médecine esthétique en France, selon le rapport du Sénat qui accompagne le projet de budget de la Sécurité sociale. Le texte précise que ce chiffre reste difficile à évaluer avec précision.
Cette approximation est explicitement signalée dans le rapport sénatorial : il s’agit d’une estimation fondée sur des données incomplètes. Le Parlement et le gouvernement entendent donc encadrer la pratique tout en améliorant la connaissance des effectifs et des parcours professionnels.
Le dispositif retenu par le Sénat laisse place à un second volet réglementaire par décret. Les modalités exactes — conditions de délivrance, durée de validité, modalités de contrôle et sanctions éventuelles — seront précisées ultérieurement, au terme des travaux réglementaires et du parcours législatif restant à accomplir.
En l’état, la mesure adoptée marque une étape dans la régulation de la médecine esthétique, en privilégiant la responsabilisation des ordres professionnels et en engageant des précisions réglementaires sur la formation et l’expérience requises pour pratiquer ces actes.





