À moins de cent jours des élections municipales, le Parlement a adopté définitivement, lundi 8 décembre, une proposition de loi destinée à encourager l’engagement des élus locaux. Le texte, transpartisan et revenu du Sénat en seconde lecture, a été voté « sans modification » par les députés, par 109 voix contre zéro; La France insoumise (LFI) s’est abstenue, les autres groupes ayant voté pour.
Un vote presque unanime et la portée du texte
Le vote reflète un consensus parlementaire sur la nécessité d’améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux. Le gouvernement et les rapporteurs ont souligné que près de 450 maires démissionnent chaque année « sous le poids des responsabilités, de la pression morale, des violences », mais aussi parce que la conciliation entre mandat, vie familiale et activité professionnelle est devenue difficile, voire impossible, selon la ministre de l’aménagement du territoire, Françoise Gatel.
Le calendrier politique est serré : l’entourage de la ministre précise que l’objectif est de publier les décrets d’application avant les municipales de mars, afin que les mesures soient opérationnelles pour la prochaine mandature.
Principales mesures financières et sociales
La mesure la plus visible concerne la revalorisation des indemnités des maires et de leurs adjoints. Le texte établit un système dégressif, plus favorable aux très petites communes, et porte une hausse de l’indemnité maximale pour certaines communes rurales. Concrètement, pour une commune de 2 000 habitants, l’indemnité de fonction mensuelle maximale passerait à 2 290 euros, contre 2 121 euros actuellement.
Le coût de cette revalorisation est estimé entre 50 et 55 millions d’euros pour l’ensemble des maires, selon l’entourage de Françoise Gatel. Par ailleurs, le Premier ministre Sébastien Lecornu a annoncé le 20 novembre, lors du congrès des maires, qu’il étudiait l’idée d’une prime de 500 euros par an pour chaque maire ; cette prime n’apparaît toutefois pas dans le texte voté.
Autre volet financier : le projet prévoit d’octroyer aux élus locaux un trimestre supplémentaire de retraite par mandat, dans la limite de trois trimestres. Cette mesure vise à reconnaître la durée et la nature du service public local dans le calcul des droits à pension.
Aménagement du temps, protections et accompagnement
Le texte contient aussi des dispositions pour faciliter la conciliation du mandat et d’une activité professionnelle. La durée du « congé électif » pour les candidats tête de liste aux élections locales est doublée, passant à vingt jours, afin de permettre une préparation plus sereine de la campagne.
Le champ des activités ouvrant droit au remboursement des frais de garde est étendu, et un statut de « l’élu étudiant » est créé. La protection fonctionnelle, qui couvre juridiquement les agents publics attaqués en raison de leurs fonctions, devient automatique pour l’ensemble des élus locaux victimes de violences, menaces ou outrages liés à leur mandat.
Le texte prévoit également des mesures d’accompagnement en matière de réinsertion post-mandat, congés maternité ou maladie pour les élus, et d’autres dispositifs destinés à rendre l’engagement local plus soutenable sur le plan personnel et professionnel.
Clarifier les conflits d’intérêts : un point sensible
Le projet cherche à préciser la notion de conflit d’intérêts pour les élus locaux, un sujet sensible pour les électeurs et les collectivités. Des situations concrètes sont visées, par exemple lorsqu’un élu siège dans deux collectivités appelées à se prononcer sur une même délibération, ou lorsqu’il est membre d’un organisme sur lequel sa collectivité doit se prononcer.
Sur ce point, la députée LFI Elisa Martin a exprimé des réserves, qualifiant de problématique la « nouvelle rédaction du conflit d’intérêts ». LFI a justifié son abstention pour des interrogations portant sur la portée et les garanties de ces dispositions.
Le gouvernement devra donc préciser, par décret et par instructions aux collectivités, la mise en œuvre pratique de ces règles, afin d’éviter des interprétations divergentes entre élus et administrations.
En l’état, la loi adopte un ensemble de mesures combinant incitations financières, protections accrus et ajustements statutaires. Le texte vise à réduire les causes de départ de maires et d’élus, tout en encadrant davantage les situations sensibles comme les conflits d’intérêts.





