Mercredi 8 octobre, l’Élysée a annoncé qu’un nouveau premier ministre serait nommé « d’ici quarante‑huit heures », à l’issue d’un entretien entre le président de la République, Emmanuel Macron, et le premier ministre démissionnaire, Sébastien Lecornu. La communication officielle précise que M. Lecornu a fait état, à l’issue de ses consultations menées ces deux derniers jours avec les partis, de trois constats : une majorité de députés est opposée à la dissolution de l’Assemblée nationale, une « plateforme de stabilité » est identifiable, et un chemin est possible pour l’adoption d’un budget d’ici au 31 décembre.
Démission et bilan des consultations
« Ce soir, je considère que ma mission est terminée », a déclaré Sébastien Lecornu lors d’un entretien au « 20 heures » de France 2, confirmant sa décision de remettre sa démission. Il a ajouté qu’il ne « courait pas après le job » de premier ministre et estimé que ce n’était « pas le moment de changer de président de la République ».
L’Élysée rappelle que le chef de l’État avait donné, lundi, au premier ministre démissionnaire quarante‑huit heures pour conduire des « ultimes » négociations afin de définir « une plateforme d’action et de stabilité pour le pays ». Selon la présidence, ces discussions ont conduit aux conclusions mentionnées publiquement : rejet majoritaire de la dissolution, existence d’une base de stabilité et possibilité d’un calendrier budgétaire abouti avant la fin de l’année.
Pressions et demandes à gauche
À gauche, la réponse a été immédiate et exigeante : le Parti socialiste et les écologistes ont réclamé la nomination d’un premier ministre issu de la gauche, tandis que La France insoumise a maintenu sa position en faveur de la destitution du chef de l’État.
Sur le réseau X, le président des députés socialistes, Boris Vallaud, a estimé : « Réforme des retraites, taxation des ultrariches… Après des années de déni macroniste, Sébastien Lecornu a reconnu que la gauche avait raison. Il faut désormais en tirer les conséquences et laisser la gauche gouverner. »
Pierre Jouvet, secrétaire général du PS, a déclaré sur LCI : « J’entends de la voix du premier ministre démissionnaire qu’il y a un certain nombre de fenêtres d’opportunité qui s’ouvrent sur la question de la réforme des retraites, sur la question d’un débat parlementaire apaisé avec l’abandon du 49.3. » Il a appelé Emmanuel Macron, « au nom du PS, de nommer un premier ministre de gauche et des Ecologistes pour mener à bien la réconciliation du pays. »
La cheffe de file des écologistes, Marine Tondelier, a estimé sur Franceinfo que « si les macronistes ne veulent pas la dissolution, je n’ai qu’une seule solution pour eux, c’est la cohabitation » avec « un gouvernement de gauche et écologiste ».
L’ancien président socialiste François Hollande, invité sur TMC, a jugé que « le président ne peut plus se tromper » et qu’il faut « un premier ministre qui ne soit pas du bloc central », estimant qu’un Premier ministre issu du camp présidentiel serait moins à même d’obtenir l’adoption d’un budget dans des conditions honorables.
Positions de La France insoumise et appels à des élections anticipées
La France insoumise est allée plus loin : son coordinateur, Manuel Bompard, a déclaré avoir compris « entre les lignes » qu’il n’y aurait « pas de premier ministre de gauche ». Mathilde Panot, présidente des députés « insoumis » à l’Assemblée nationale, a prononcé une proposition politique forte après l’intervention de M. Lecornu sur France 2.
« Le comique de répétition a assez duré », a‑t‑elle dit au siège de son parti, ajoutant : « Puisque le premier ministre a indiqué ce soir qu’aucun sujet ne pouvait être tranché pendant dix‑huit mois en attendant l’élection présidentielle de 2027, nous proposons, nous, comme solution, que le peuple français puisse décider de son avenir dès maintenant et qu’avec le départ d’Emmanuel Macron, il puisse y avoir une présidentielle anticipée. »
Des appels identiques se sont faits entendre à droite et à l’extrême droite. Sur X, Éric Ciotti, président de l’Union des droites, a écrit : « Sébastien Lecornu embrouille les Français pour donner du temps au président déchu. Il est définitivement discrédité. Nous censurerons tout gouvernement jusqu’à la dissolution ou la démission du président. Le seul chemin possible. »
Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a ironisé sur « le long bavardage de Sébastien Lecornu au JT de 20 heures de France 2 » et jugé que cela « illustre, à lui seul, l’impasse des discussions de couloirs ». Selon lui, « la France a besoin de clarté, de stabilité, d’une nouvelle majorité : seul le retour aux urnes permettra au peuple de se choisir un destin. »
Calendrier et perspectives
Sur le plan strictement institutionnel, l’exécutif a annoncé la désignation d’un nouveau chef du gouvernement dans les quarante‑huit heures suivant l’entretien présidentiel de mercredi soir. Au‑delà de cette échéance annoncée, les positions politiques restent très polarisées : la gauche réclame Matignon, LFI exige des mesures plus radicales, et la droite comme l’extrême droite appellent à des élections anticipées si la présidence ne cède pas à leurs demandes.
Les éléments communiqués par l’Élysée — refus d’une dissolution par une majorité de députés, existence d’une plateforme de stabilité et possibilité d’adopter un budget avant le 31 décembre — constituent pour l’heure le cadre officiel de sortie de crise. Les prochaines nominations et les discussions parlementaires à venir détermineront si cette base suffit à stabiliser la situation politique.