Le jeune Mohamed Kessaci, 20 ans, a été abattu par balles jeudi 13 novembre en milieu d’après-midi dans le 4ᵉ arrondissement de Marseille. Son meurtre a suscité une réaction immédiate des autorités : vendredi 14 novembre, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a qualifié l’événement « d’un point de bascule effrayant » et a mis en garde contre « la mafia du narcobanditisme » qui, selon lui, menace l’ensemble de la société française.
Le parquet de Marseille a ouvert une enquête pour « assassinat en bande organisée » et « association de malfaiteurs en vue de commettre un crime ». Les investigations sont en cours et, à ce stade, aucun lien formel avec le narcobanditisme n’a été établi publiquement.
Les circonstances de l’attaque
Selon le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, les faits se sont déroulés aux alentours de 14 h 30, à proximité de la plus grande salle de concert de la ville. « Une moto s’est portée à hauteur du véhicule de la victime qui venait de se garer. Le passager arrière de la moto a tiré à plusieurs reprises sur la victime, qui était toujours dans son véhicule. Plusieurs étuis de 9 mm ont été retrouvés sur place », a-t-il déclaré dans un communiqué.
Les premières constatations matérialisent un mode opératoire déjà observé dans d’autres affaires de violences urbaines et de règlements de comptes : attaque rapide depuis un deux-roues, tirs nombreux et fuite immédiate. Les autorités judiciaires ont indiqué que la scène a été sécurisée et que des éléments balistiques sont en cours d’analyse.
Hypothèse d’un message adressé au militant
La victime était le frère d’Amine Kessaci, militant écologiste et connu pour ses prises de position contre le trafic de drogue à Marseille. Interrogé par France Inter, le procureur Nicolas Bessone a déclaré que « cette hypothèse à ce stade n’est absolument pas exclue ». Il a ajouté : « Si tel devait être le cas, on aurait franchi une étape supplémentaire. Ça rappelle un certain nombre de périodes terribles connues dans notre pays, où vous allez assassiner des gens, simplement parce qu’ils sont membres d’une famille avec laquelle vous avez des problèmes. »
Les enquêteurs cherchent à déterminer si le meurtre visait directement Mohamed Kessaci ou s’il s’inscrivait dans un message adressé à son frère. L’instruction devra également établir d’éventuelles complicités et retracer les mouvements des assaillants avant et après les faits.
Contexte politique et mesures annoncées
Sur le réseau X, Gérald Darmanin a appelé à une intensification des réponses de l’État face à ce qu’il qualifie de « terreur ». Il a énuméré plusieurs mesures récentes et en projet pour lutter contre le trafic de drogue : « Loi narcotrafic, prisons de haute sécurité, parquet national anti-criminalité organisée, renforcement considérable des magistrats spécialisés dans la lutte contre la drogue, augmentation sans précédent des extraditions venant des pays étrangers, lutte acharnée contre le blanchiment d’argent. »
Ces annonces interviennent alors que les autorités judiciaires disent multiplier les moyens pour répondre à la montée des violences liées aux réseaux de stupéfiants. Les responsables locaux et nationaux insistent sur la nécessité d’une mobilisation continue des services de police et de justice.
Un environnement marqué par des « narchomicides »
Selon un décompte de l’Agence France‑Presse (AFP), quatorze personnes ont perdu la vie dans des « narchomicides » depuis le début de l’année 2025 dans les Bouches‑du‑Rhône. Ce terme, employé dans le comptage de l’AFP, souligne la répétition des meurtres liés, selon les autorités et observateurs locaux, aux tensions entre réseaux criminels et aux violences urbaines associées au trafic.
Les autorités rappellent cependant que chaque dossier fait l’objet d’une vérification judiciaire et que l’expression d’un lien avec les trafics doit être confirmée par l’enquête. Pour l’heure, la qualification juridique retenue par le parquet pour l’affaire de Mohamed Kessaci est celle d’un assassinat en bande organisée, avec la mise en œuvre d’une instruction destinée à établir les responsabilités.
Parmi les éléments de contexte rapportés par la presse, l’Agence France‑Presse indique qu’Amine Kessaci était placé sous protection judiciaire depuis la publication, à la rentrée, d’un livre intitulé Marseille, essuie tes larmes, publié par la maison d’édition marseillaise Le Bruit du monde. Dans cet ouvrage, il adresse notamment une « longue lettre » à son grand frère Brahim, lui-même tué dans un précédent « narchomicide », et écrit : « La politique ne m’a jamais tendu la main, alors j’ai décidé de la prendre à la gorge (…). Brahim, c’est toi qui m’as jeté dans ses bras le jour où tu as brûlé dans une voiture. »
Les investigations se poursuivent et les autorités judiciaires ont invité à la prudence tant que les éléments matériels et les auditions n’auront pas permis d’établir l’enchaînement complet des faits et leurs mobiles.





