Les cabinets de fiscalistes et les études notariales voient leur agenda se remplir à un rythme soutenu, au point d’éclipser celui d’un « dentiste à la mode », image reprise par plusieurs professionnels. Cette ruée s’explique par la perspective d’un nouveau budget pour 2026 et par des mesures évoquées qui pourraient toucher les patrimoines et la transmission d’entreprises.
Les sujets qui alimentent l’inquiétude
Trois pistes fiscales apparaissent au centre des discussions : une ponction sur les holdings patrimoniales, une refonte du pacte Dutreil — le dispositif relatif à la transmission familiale des entreprises — et la création d’un « impôt sur la fortune non productive ». Ces termes, abondamment évoqués dans les débats publics, suffisent à susciter des réunions et des sollicitations auprès de conseillers spécialisés.
Les entrepreneurs, investisseurs et dirigeants cherchent à comprendre l’impact potentiel de ces mesures sur leur situation patrimoniale et sur la gouvernance de leurs sociétés familiales. Sans entrer dans le détail des textes encore à l’étude, ces orientations relèvent de questions récurrentes : définition de la « productivité » d’un actif, conditions de transmission exonérée ou aménagée, et modalités pratiques d’application pour les holdings.
Pression sur les professionnels du conseil
« Nous recevons beaucoup de sollicitations qui s’expliquent par la montée de l’inquiétude chez les dirigeants d’entreprises et les investisseurs pour qui les niveaux d’impôts évoqués deviennent insoutenables », rapporte Benjamin Lafaye, associé du cabinet d’avocats Cornet Vincent Segurel à Lyon. Il ajoute : « Certains ont commencé à s’organiser pour quitter la France au cas où ces projets fiscaux verraient le jour. »
Cette citation illustre deux réalités : d’abord, une augmentation sensible de la demande de conseils juridiques et fiscaux ; ensuite, la recherche d’options patrimoniales pouvant aller jusqu’à des projets de mobilité. Ces démarches impliquent audits, simulations et parfois réorganisation juridique des actifs, tâches qui mobilisent fortement fiscalistes et notaires.
Un débat politique marqué
Le projet budgétaire pour 2026 polarise le débat politique. La gauche appelle à « plus de justice fiscale », formule résumant son souhait d’un renforcement de la contribution des hauts patrimoines. À l’inverse, la droite dénonce une « folie » qui, selon ses représentants, risquerait de freiner la croissance économique et d’affaiblir l’attractivité pour les entrepreneurs.
Ces oppositions politiques expliquent en partie le climat d’incertitude. Tant que les textes définitifs ne seront pas rendus publics et adoptés, les acteurs concernés restent dans l’attente et multiplient les consultations pour anticiper différents scénarios.
Conséquences pratiques pour les patrimoines et les entreprises
Sur le plan pratique, les mesures évoquées posent des questions opérationnelles : comment requalifier ou restructurer un patrimoine, quels dispositifs de transmission conserver ou adapter, et quelles sont les implications fiscales d’un transfert de résidence. Les réponses varient fortement selon la composition du patrimoine, la taille de l’entreprise, et la nature des participations.
Les notaires, fiscalistes et avocats sont donc sollicités pour réaliser des diagnostics personnalisés, chiffrer des scénarios et proposer des solutions compatibles avec le droit en vigueur. Ces travaux exigent du temps et mobilisent des ressources professionnelles, d’où la saturation des agendas observée dans plusieurs cabinets.
Une attente de clarification
Juridiquement et fiscalement, l’essentiel reste conditionné aux textes qui seront validés dans le cadre du budget 2026. En l’absence de décisions définitives, de nombreux chefs d’entreprise et investisseurs s’attachent à préserver des marges de manœuvre : examen des pactes familiaux, vérification des statuts de holdings, et mise en place de conseils pluridisciplinaires.
Pour l’instant, la dynamique décrite par les professionnels traduit davantage de l’anticipation que des ajustements irréversibles. Le recours accru à des conseils spécialisés montre l’importance croissante, pour les patrimoines importants, de se préparer à plusieurs hypothèses réglementaires.
Les prochains mois seront déterminants : l’annonce de mesures précises, leur calendrier d’entrée en vigueur et les modalités d’application fixeront ensuite des priorités d’action pour les acteurs concernés. En attendant, fiscalistes et notaires restent à la tâche, sollicités pour éclairer des situations souvent complexes et pour accompagner des décideurs soucieux d’anticiper les conséquences d’un budget qui s’annonce chargé.





