Trois jours après le rejet par l’Assemblée nationale du projet de budget de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, le Sénat était appelé, lundi 15 décembre, à se prononcer sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2026. Le rejet au Palais-Bourbon a renvoyé la balle dans le camp du Parlement et a intensifié la pression sur la chambre haute et sa majorité de droite et du centre, a souligné la porte-parole du gouvernement, Maud Brégeon.
Rappel de la procédure et calendrier
Le 21 novembre, l’Assemblée nationale n’a pas adopté la première partie du projet de loi de finances, qui fixe les recettes de l’État pour l’année à venir. Le texte a donc été considéré comme rejeté par la chambre basse et transmis au Sénat.
Le 4 décembre, le Sénat a adopté la première partie du PLF par 198 voix contre 105. Il a ensuite examiné la deuxième partie relative aux dépenses avant de voter l’ensemble du texte le 15 décembre. Selon les comptes rendus, les sénateurs favorables au budget l’ont emporté à une nette majorité lors des votes.
Chiffres macroéconomiques et conséquences budgétaires
Selon la version initiale du texte présentée par Matignon, l’objectif était de réduire le déficit public à 4,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2026, contre 5,4 % en 2025 (avant un objectif légèrement moins ambitieux, à 4,9 %). L’inflation y est attendue à 1,3 % en 2026, après 1,1 % en 2025, et le ratio d’endettement public devrait s’établir à 117,9 % du PIB en 2026, contre 115,9 % en 2025.
Le ministre délégué aux Comptes publics, David Amiel, a exposé un calcul chiffré au Palais du Luxembourg : si le texte adopté par le Sénat le 15 décembre était retenu, le déficit public pour 2026 pourrait atteindre 5,3 % du PIB. Cette divergence de 0,4 point entre l’estimation sénatoriale et celle du gouvernement se traduirait, selon les chiffres avancés, par un écart d’environ 12 milliards d’euros.
Vers des négociations parlementaires
Pour tenter de sortir de l’impasse, une commission mixte paritaire (CMP) paritaire, composée de sept députés et sept sénateurs, a été programmée pour le vendredi 19 décembre. Sa mission est de trouver un terrain d’entente entre les deux chambres sur l’ensemble du texte.
La réalité politique complique toutefois les discussions : l’intransigeance affichée par le chef des Républicains au Sénat, Bruno Retailleau, souligne l’ampleur de la tâche. Dans le débat, il a prévenu : « Il ne pourra pas y avoir d’accord sur un budget qui augmenterait considérablement les impôts et ne réduirait pas significativement la dette. »
Scénarios de repli et échéances constitutionnelles
Si la CMP n’aboutit pas à un accord, le texte pourrait retourner en navette parlementaire, avec une deuxième lecture à l’Assemblée nationale. Dans ce scénario, l’adoption d’un budget pour 2026 avant la fin de l’année serait compromise.
Le gouvernement dispose toutefois d’options pour éviter le blocage. La première consiste à recourir à une loi spéciale, un texte très bref permettant notamment de continuer à percevoir certains impôts après le 1er janvier. Une date d’examen évoquée pour cette procédure se situerait autour du 26 décembre, selon les hypothèses mentionnées dans les échanges parlementaires.
Le Premier ministre, Sébastien Lecornu, a réaffirmé le 10 décembre en Conseil des ministres que l’objectif du gouvernement demeurait de « doter la France d’un budget » avant l’expiration du délai constitutionnel fixé au 31 décembre. Le calendrier est donc serré et plusieurs options restent ouvertes pour sortir de l’impasse.
Sur le plan européen, la France reste inscrite dans le Pacte de stabilité et de croissance, qui fixe des repères historiques : ne pas dépasser 3 % du PIB pour le déficit public et 60 % du PIB pour la dette publique. Ces règles, maintenues mais assouplies lors de révisions récentes, restent une contrainte de moyen terme ; le gouvernement s’est donné pour objectif de ramener le déficit sous la barre des 3 % en 2029, une trajectoire évoquée dans les documents officiels.
En attendant, députés et sénateurs vont devoir négocier dans des délais courts pour déterminer les recettes et les dépenses de l’État pour l’exercice 2026, alors que se profilent des choix budgétaires aux conséquences chiffrées et politiques sensibles.





