Si le projet de loi de finances pour 2026 est adopté en l’état, 300 000 étudiants perdront leur droit à l’aide personnalisée au logement (APL) d’ici à la prochaine rentrée universitaire. Cette aide, qui représente entre 100 et 250 euros par mois, constitue pour beaucoup une ressource décisive face à une précarité déjà marquée.
Une suppression ciblée sur la nationalité
Le texte prévoit de supprimer les APL pour tous les étudiants extracommunautaires non boursiers, soit la quasi-totalité des étudiants étrangers, sur le seul critère de la nationalité. Autrement dit, les bénéficiaires potentiels seraient exclus non en raison de leurs revenus mais du fait de leur statut national et de l’absence d’attribution d’une bourse sur critères sociaux.
Cette mesure, présentée dans le cadre du gouvernement dirigé par Sébastien Lecornu, s’ajoute à d’autres contraintes financières auxquelles font déjà face ces étudiants, comme des frais de scolarité différenciés et des démarches administratives lourdes lors des inscriptions.
Précarité alimentaire et files d’attente
La suppression annoncée de l’APL accentuerait des situations déjà fragiles. Certains étudiants étrangers se disent contraints de compter sur les distributions alimentaires et d’attendre dans des files d’aide pour pouvoir se nourrir. La perte de 100 à 250 euros par mois peut représenter une part importante du budget d’un étudiant, notamment pour le paiement d’un loyer dans les grandes villes.
Le texte souligne également que neuf étudiants étrangers sur dix ne perçoivent pas de bourse sur critères sociaux. Cette exclusion tient aux règles d’éligibilité très strictes : pour prétendre à une bourse sur critères sociaux, l’étudiant doit notamment résider en France depuis au moins deux ans et avoir domicilié son foyer fiscal dans le pays, conditions qui éliminent de nombreux profils indépendamment de leurs ressources.
Données sur la situation financière des étudiants étrangers
D’après l’Observatoire national de la vie étudiante (ONVE) pour l’année 2023, 41 % des étudiants étrangers déclaraient éprouver des difficultés financières les empêchant de couvrir des besoins de base — alimentation, paiement du loyer, gaz ou électricité. Le pourcentage est nettement inférieur chez les étudiants de nationalité française, qui étaient 15 % dans cette situation selon la même source.
Ces écarts traduisent des vulnérabilités structurelles : accès limité aux aides sociales, obligations administratives spécifiques, et, pour certains, des frais d’inscription plus élevés. Les conséquences vont au-delà des seules difficultés financières : elles affectent aussi l’accès à un logement stable et décent.
Accès au logement et pratiques des bailleurs
Les étudiants étrangers rencontrent plus fréquemment des obstacles pour trouver un logement abordable. Le texte mentionne que certains bailleurs peuvent pratiquer des loyers plus élevés en se fondant sur la nationalité des candidats locataires. En conséquence, un nombre significatif d’étudiants étrangers se retrouvent dans des solutions d’hébergement précaires, parfois temporairement à la rue ou installés chez des tiers.
La suppression de l’APL risquerait d’alourdir ces situations, en réduisant le pouvoir d’achat disponible pour payer un loyer et en augmentant la dépendance à des solutions informelles ou d’urgence.
Enjeux politiques et calendrier
La portée de la mesure dépendra du sort réservé au projet de loi de finances lors des débats parlementaires et d’éventuelles modifications. À ce stade, l’impact annoncé — la disparition des APL pour 300 000 étudiants — donne une indication significative de l’ampleur des conséquences financières potentielles pour la population étudiante étrangère non boursière.
Sur le plan social, la suppression envisagée soulève des questions d’égalité d’accès aux aides publiques et de cohérence des dispositifs d’aide aux étudiants. Elle met notamment en lumière la tension entre règles d’éligibilité aux bourses, conditions de résidence exigées et mesures ciblées sur la nationalité.
Si le texte n’est pas amendé, la mise en œuvre interviendrait avant la rentrée universitaire suivante, rendant urgente la clarification des modalités pour les étudiants concernés et des alternatives pour prévenir une aggravation de la précarité étudiante.


                

														
                                            
                                            
                                            
                                            
                                            
                                            
