Après l’adoption attendue du budget de la Sécurité sociale, prévue mardi 16 décembre à l’Assemblée nationale, la question est simple et lourde de conséquences : les parlementaires parviendront‑ils, d’ici au 31 décembre, à se mettre d’accord sur le projet de loi de finances (PLF) de l’État ?
Un calendrier serré et contraignant
Le calendrier parlementaire des prochains jours expose la difficulté de l’exercice. Le PLF doit encore être voté « lundi » au Sénat, puis renvoyé en commission mixte paritaire (CMP) — une réunion de sept députés et sept sénateurs — programmée vendredi. En cas d’accord de la CMP, le texte reviendrait ensuite à l’Assemblée nationale le 23 décembre, date‑limite pour adopter un budget national avant la fin de l’année.
Cette trajectoire laisse peu de marge d’erreur : chaque étape est séquencée et dépend des conclusions précédentes. Le gouvernement juge l’option « encore jouable » et insiste sur la nécessité d’une « culture du compromis » pour respecter ce calendrier.
Optimisme gouvernemental face au scepticisme des députés
Le ministre de l’Économie, Roland Lescure, a exprimé un optimisme marqué. « Sur le budget de la Sécurité sociale, ce qui était improbable est devenu possible », s’est‑il réjoui, avant d’ajouter : « Je reste convaincu qu’il est possible d’adopter celui de l’État avant la fin de l’année. » Ces propos reflètent la position officielle : atteindre un accord rapide éviterait l’ouverture d’une période d’extérieurs budgétaires et limiterait les incertitudes économiques à la clôture de l’année.
Pour autant, une large part des députés restent dubitatifs. La sortie du PLF il y a quelques semaines s’est faite sur un vote inédit : 404 voix contre et une seule voix pour. Ce résultat a souligné la profondeur des tensions au sein de l’hémicycle et la difficulté d’aligner des majorités stables sur le calendrier imposé.
Des désaccords profonds sur l’équilibre recettes/dépenses
Les antagonismes portent au premier chef sur la trajectoire du déficit public et les moyens pour y parvenir. Le gouvernement maintient l’objectif d’un déficit public ramené, au maximum, à 5 % du produit intérieur brut (PIB). Face à cet impératif, les lignes politiques s’opposent nettement.
La gauche exige davantage d’équité fiscale et plaide pour des recettes accrues afin de financer les politiques publiques. À l’inverse, la droite refuse les hausses d’impôts et préconise des réductions de dépenses. Entre ces positions, les marges de manœuvre sont étroites et les concessions difficiles à obtenir.
Le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Boris Vallaud, a résumé ce scepticisme en déclarant : « Je ne vois pas le chemin. » Cette phrase illustre la frustration d’une partie des députés, qui anticipent des discussions plus âpres que celles menées sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).
Sur le PLFSS, le passage a lui‑même été laborieux : le texte a été adopté à l’Assemblée nationale en deuxième lecture « à 13 voix près », un résultat qui témoigne de marges de majorité réduites et d’un climat parlementaire tendu.
Les enjeux concrets et l’incertitude politique
Au‑delà des calendriers et des équilibres techniques, l’enjeu est politique : parvenir à un consensus impliquera des compromis substantiels sur la fiscalité ou sur les dépenses. Le contexte impose des arbitrages rapides, mais les positions de principe des partis rendent les compromis coûteux en termes d’image et de cohésion interne.
Juridiquement, si le PLF ne peut pas être adopté avant le 31 décembre, le gouvernement pourrait utiliser des mécanismes transitoires pour financer l’État au début de l’année suivante. Politique et institutionnellement, une telle issue serait toutefois perçue comme un échec parlementaire, amplifiant la pression sur les négociateurs pendant les derniers jours de l’année.
En l’état, l’option d’un accord avant la fin de l’année reste soutenue par l’exécutif, mais la route paraît étroite. Les prochains votes et la tenue de la CMP seront déterminants pour savoir si le calendrier contraint tiendra ou si la France entrera dans une période d’incertitude budgétaire au seuil de la nouvelle année.




