Trois semaines après son départ de Matignon, François Bayrou s’est présenté sous un jour apaisé lors de la rentrée politique du MoDem, organisée du vendredi 26 au dimanche 28 septembre à L’Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse). Les adhérents ont retrouvé un leader visible mais peu enclin à rouvrir le débat public sur les événements qui ont conduit à sa démission.
Une rentrée délocalisée et symbolique
Le parti centriste tenait son université d’été hors de Guidel (Morbihan) pour la première fois depuis 2012, invoquant des raisons logistiques. Ce changement de lieu, souligné par les organisateurs, visait à marquer une nouvelle étape du calendrier interne du MoDem sans pour autant signifier une rupture idéologique nette.
La tenue du rassemblement à L’Isle-sur-la-Sorgue a permis une ambiance plus feutrée que celle des grands rendez‑vous médiatiques, favorisant des échanges de proximité entre militants et cadres du parti. Selon plusieurs participants, la tonalité générale a oscillé entre volonté de tourner la page et interrogation sur l’avenir politique immédiat du mouvement.
Un leader apaisé, des militants réservés
François Bayrou, qui était au centre des attentions, est apparu maître de lui. Son discours a cherché à rassurer les adhérents sans toutefois revenir de manière approfondie sur les raisons précises de son départ de Matignon. Cette retenue a été perçue par certains comme une stratégie de préservation politique et par d’autres comme une forme d’évitement.
Peu enclins à revenir sur l’échec de leur chef de file, accablé par les oppositions pour sa responsabilité dans sa propre chute, les militants se sont interrogés tout au long du week‑end sur la capacité de son successeur à incarner la rupture promise. Ces interrogations portent autant sur la direction stratégique du parti que sur sa visibilité au sein de la majorité politique.
Les doutes suscités par le nouveau Premier ministre
L’entretien de Sébastien Lecornu au Parisien, où le nouveau Premier ministre « n’offre aucun gage aux socialistes », a cristallisé une partie du scepticisme. Plusieurs responsables et adhérents ont relayé, dans des discussions informelles, leur inquiétude quant aux orientations à venir et au positionnement du gouvernement vis‑à‑vis du centre.
La remarque de Jules Pasquier, président des jeunes démocrates, a résumé ce sentiment de défiance lorsqu’il a ironisé : « On a une certaine expérience en la matière en disant que c’est mal embarqué ». Cette citation a été largement reprise lors des échanges internes et traduit une prudence marquée mais non unanime au sein des rangs centristes.
Entre prudence et nécessité d’un projet
Durant le week‑end, les débats ont peu porté sur des annonces programmatiques détaillées. Les discussions ont davantage tourné autour de la question de la représentation : qui, au sein de la majorité, pourra porter les valeurs et les priorités du MoDem ? À défaut de réponses claires, certains militants ont réclamé plus de visibilité et d’initiatives concrètes pour affirmer l’identité du parti.
La nécessité de tirer des enseignements de l’échec récent a été évoquée sans qu’un consensus apparent n’émerge. Les prises de parole publiques ont alterné entre volonté de lucidité — reconnaître les erreurs possibles — et appel au rassemblement interne pour préparer les échéances à venir.
Au terme de cette université d’été délocalisée, le MoDem semble rester dans une phase de transition : un fondateur apaisé mais discret, des militants soucieux de consolider leur influence et des interrogations persistantes sur la capacité de la nouvelle équipe gouvernementale à incarner la rupture promise.
Sans décisions structurelles annoncées durant ces trois jours, le parti centriste doit désormais transformer cette rentrée en feuille de route opérationnelle si elle souhaite convaincre ses adhérents et peser sur les choix de la majorité.