Fraude fiscale : le projet de loi 2026 hué par la Cour des comptes qui dénonce recettes en baisse, sanctions inchangées et manque de moyens

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Le projet de loi contre la fraude fiscale et sociale, débattu à l’Assemblée à partir du 13 janvier 2026, promet des outils renforcés mais la Cour des comptes, dans un rapport du 16 décembre 2025, tempère fortement cet affichage : les montants de la fraude restent mal connus, les recettes issues des contrôles ont baissé et les sanctions n’ont pas été durcies en dix ans. Le rapport appelle à mieux mesurer le phénomène, à stabiliser les recettes des contrôles et à doter réellement l’État de moyens humains, techniques et juridiques pour restaurer l’efficacité de la lutte contre la fraude.

Le projet de loi contre les fraudes sociales et fiscales, adopté par le Sénat, doit être débattu à l’Assemblée nationale à partir du 13 janvier 2026. Le gouvernement dirigé par Éric Lecornu promet « des outils toujours plus efficaces » pour « traquer sans relâche la fraude fiscale et sociale », mais un rapport de la Cour des comptes, rendu public le mardi 16 décembre 2025, relativise fortement cet affichage.

Trois constats sévères de la Cour des comptes

La Cour des comptes, après avoir passé en revue les politiques et actions conduites durant la dernière décennie, dresse un bilan décevant sur trois points majeurs. Premièrement, l’ampleur même de la fraude fiscale reste mal connue : les estimations disponibles sont trop divergentes pour fournir un diagnostic solide.

Deuxièmement, les recettes nettes issues des contrôles fiscaux et sociaux rapportées au total des prélèvements publics ont diminué, selon le rapport. Cette érosion interroge l’efficacité opérationnelle des contrôles et la capacité de l’État à convertir les moyens engagés en recettes durables.

Troisièmement, et peut-être le plus frappant, la Cour constate que la fraude « n’est ni plus fréquemment ni plus durement sanctionnée qu’il y a dix ans ». Autrement dit, malgré les annonces et lois successives, les poursuites et les peines n’ont pas connu d’accélération perceptible.

Des chiffres qui varient et un diagnostic incertain

Sur l’estimation du montant annuel de la fraude fiscale, les fourchettes avancées divergent fortement. Certains acteurs évoquent des montants modestes, de l’ordre de 10 ou 17 milliards d’euros, tandis que d’autres, notamment des syndicats ou observateurs, évoquent des sommes bien plus élevées, parfois supérieures à 100 milliards d’euros.

Le Conseil d’analyse économique, rattaché à Matignon, avait déjà tenté de cadrer le sujet dans une note datée du 16 octobre 2025. Il proposait une fourchette « entre 14 et 52 milliards d’euros » par an, illustrant l’amplitude des incertitudes. La Cour des comptes agrandit encore cette zone d’incertitude et met en garde : « Nul ne peut aujourd’hui se hasarder à affirmer que ce montant est proche de 30 [milliards] ou de 130 milliards d’euros ». Cette formule souligne l’absence de mesure fiable et réplicable.

L’imprécision statistique tient autant à la complexité des pratiques frauduleuses qu’à la fragmentation des données et des méthodes d’évaluation. La Cour, sans proposer de nouveau chiffre contraignant, appelle implicitement à renforcer la qualité des diagnostics et la transparence méthodologique.

Entre volontés affichées et moyens réels

Le rapport met en lumière un écart persistant entre la rhétorique politique et les capacités opérationnelles de l’État. Selon la Cour, la volonté politique n’apparaît pas suffisamment puissante, ou suffisamment dotée, pour compenser le manque de moyens dédiés à la lutte contre la fraude. Ce constat renvoie à des questions de gouvernance, d’allocation budgétaire et de priorités administratives.

Pour les auteurs du rapport, il ne suffit pas d’annoncer des outils plus efficaces pour obtenir des résultats mesurables. La réduction des recettes issues des contrôles, conjuguée à l’absence d’un durcissement des sanctions, suggère que les efforts doivent porter autant sur la stratégie que sur les moyens humains, techniques et juridiques mobilisés.

L’examen parlementaire attendu à partir du 13 janvier 2026 constituera un moment clé pour savoir si le texte proposé répond aux lacunes identifiées par la Cour des comptes. Le gouvernement avance des objectifs clairs; reste à voir si le dispositif législatif et les crédits correspondants seront suffisants pour transformer ces objectifs en résultats tangibles.

En l’état, la synthèse de la Cour des comptes invite à la prudence : améliorer la connaissance du phénomène, stabiliser les recettes tirées des contrôles et renforcer l’efficacité des sanctions sont les trois chantiers qui, selon le rapport, conditionneront la crédibilité de la future politique de lutte contre la fraude fiscale et sociale.

Parlons Politique

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