La gauche perd sa majorité au Bureau de l’Assemblée
Jeudi 2 octobre, la gauche a perdu la majorité au Bureau de l’Assemblée nationale : le Rassemblement national (RN) a fait son retour dans cette instance exécutive grâce à un accord avec le « socle commun ». Les députés ont achevé le renouvellement des membres du Bureau après l’élection, la veille, des six vice-présidents et des trois questeurs.
Le Bureau occupe une place stratégique dans le fonctionnement parlementaire. Il intervient, notamment, pour décider des sanctions disciplinaires les plus sévères à l’encontre des députés et pour statuer sur la recevabilité de certains textes. Sa composition influe donc directement sur la vie institutionnelle et sur le déroulement des travaux législatifs.
Comment s’est jouée la nouvelle répartition
Le règlement intérieur prévoit une répartition proportionnelle des sièges au Bureau, fondée sur un système de points, mais uniquement si tous les groupes en conviennent. Faute d’un accord général, les sièges sont attribués par vote. Cette année, la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), souhaitait appliquer une répartition reflétant le poids relatif des groupes parlementaires.
La gauche s’est opposée à l’application du système de points, invoquant le principe du « front républicain » pour refuser l’entrée du RN dans les instances de l’Assemblée. Malgré cette opposition, le RN et le socle commun se sont entendus et ont voté ensemble pour imposer la répartition proportionnelle prévue par le règlement.
Le résultat chiffré est le suivant : le RN et ses alliés ciottistes obtiennent cinq représentants au sein du Bureau. Le socle commun — composé de Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains — totalise neuf représentants, en comptant la présidente. La gauche (La France insoumise, le Parti socialiste, les Écologistes et les communistes) en dispose de sept. Le groupe centriste indépendant Liot décroche également un secrétaire.
Après l’annonce des résultats, Yaël Braun-Pivet a déclaré : « Je voudrais remercier chacun d’entre vous pour sa participation à ces élections qui se sont déroulées de façon apaisée et en bon ordre. »
Composition, calendrier et premières conséquences
Le nouveau Bureau comprend 22 membres au total : 12 femmes et 10 hommes. Il doit se réunir pour la première fois mercredi. Avant cette première réunion, les députés sont appelés, dès jeudi à 15 heures, à élire les présidents des huit commissions permanentes de l’Assemblée, des postes eux aussi hautement stratégiques pour l’agenda législatif.
La journée promet d’être difficile pour la gauche : la coalition gouvernementale a affiché sa volonté de lui ravir la présidence de commissions clés, en particulier celle des Affaires économiques (actuellement présidée par un élu de La France insoumise) et celle des Affaires culturelles (actuellement présidée par un élu du Parti socialiste). Ces présidences donnent à leurs titulaires une influence importante sur l’ordre du jour et les auditions organisées par les commissions.
Par ailleurs, le socle commun ambitionne de reprendre à Charles de Courson (groupe Liot) le poste de rapporteur général du budget. Sur ce point, le RN pourrait jouer un rôle d’arbitre : la gauche alliée au groupe Liot pèse globalement davantage que le socle commun, ce qui rend l’issue dépendante des choix et des abstentions des différents groupes lors des scrutins.
Ces jeux d’alliances et d’arbitrages mettent en lumière la fragilité des majorités parlementaires et la manière dont des accords ponctuels entre groupes peuvent modifier l’équilibre des pouvoirs au sein de l’Assemblée.
Les prochains jours permettront de mesurer l’impact concret de ce nouveau rapport de forces sur le calendrier législatif et sur les orientations budgétaires, à mesure que le Bureau et les présidences de commissions prendront leurs fonctions.