La France insoumise (LFI) a annoncé, lundi 8 décembre, sa décision de saisir l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle (Arcom) à la suite d’un échange télévisé au cours duquel l’éditorialiste politique Nathalie Saint‑Cricq a rapproché l’antisémitisme de « la quête du “vote musulman” ».
Contexte de l’échange sur Franceinfo
Sur Franceinfo, mercredi 3 décembre, Nathalie Saint‑Cricq interrogeait Alexis Corbière au sujet des accusations d’antisémitisme visant régulièrement LFI. Alexis Corbière, député de Seine‑Saint‑Denis qui a quitté le mouvement l’an dernier, a répondu : « L’antisémitisme est chose sérieuse. Il existe dans le pays. »
La journaliste a enchaîné : « La quête du “vote musulman” aussi. » Interpellé, M. Corbière lui a demandé si elle pensait que certains élus tenaient des propos antisémites dans le but de séduire l’électorat musulman. « Ah oui », a répondu Nathalie Saint‑Cricq.
Le député a fortement récusé cette idée : « Je trouve cela intolérable. Les musulmans n’ont pas besoin qu’on leur tienne des propos antisémites pour qu’ils votent pour quelqu’un. Je ne sais pas d’où vient cette idée que pour avoir les musulmans avec soi il faudrait être antisémite », a‑t‑il déclaré à l’antenne.
Les propos contestés et leur précision
Au cours de l’échange, la journaliste a ajouté : « Ça peut aider », avant de préciser qu’elle ne visait pas la communauté musulmane dans son ensemble mais « ceux qui croient (…) qu’en leur disant des propos antisémites on va pouvoir les rallier. Ce n’est pas du tout pareil. » Ces propos ont été au cœur de la controverse qui a suivi.
Face à ces déclarations, LFI a estimé que le rapprochement opéré par Nathalie Saint‑Cricq relève d’une essentialisation problématique. Dans le courrier de saisine de l’Arcom, consulté par l’Agence France‑Presse, le mouvement écrit : « De tels propos constituent une essentialisation profondément problématique, assimilant des millions de citoyens français à un groupe dont les choix électoraux seraient déterminés par une complaisance supposée envers l’antisémitisme. »
Le courrier ajoute : « Un tel amalgame est infondé, dangereux et incompatible avec les valeurs républicaines comme avec les obligations du service public audiovisuel. » LFI demande ainsi à l’autorité de régulation d’examiner si ces propos contreviennent aux obligations déontologiques et au respect du pluralisme et de la dignité des personnes.
Réactions externes et saisine de l’Arcom
La polémique a dépassé le seul cadre politique. Dimanche soir, sur le réseau X, Chems‑Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, a annoncé son intention de saisir l’Arcom, qualifiant les déclarations d’« extrêmement graves ». Cette annonce témoigne de l’ampleur de l’émoi suscité par l’échange.
L’intervention de personnalités religieuses et politiques montre que la question dépasse le simple débat d’antenne : elle interroge la manière dont les médias abordent les liens supposés entre identité religieuse et comportements électoraux, ainsi que la responsabilité des journalistes dans la formulation de rapprochements susceptibles de stigmatiser des groupes entiers.
Enjeux et portée
La saisine de l’Arcom par LFI et la mobilisation de la Grande Mosquée de Paris ouvrent une procédure de contrôle formel autour du respect des obligations du service public audiovisuel et du traitement des sujets sensibles. L’issue de cette saisine dépendra de l’analyse de l’autorité sur la nature exacte des propos, leur mise en contexte et leur conformité aux règles encadrant la diffusion d’émissions radiophoniques et télévisées.
Sur le plan politique, la polémique illustre la tension persistante autour des accusations d’antisémitisme qui visent certains responsables de gauche, ainsi que la sensibilité accrue aux formulations susceptibles d’être perçues comme stigmatisantes envers les citoyens de confession musulmane. Plusieurs acteurs ont déjà exprimé leur indignation, tandis que d’autres appellent au respect du contexte et à la précision du langage.
À ce stade, les faits rapportés se limitent à l’échange diffusé sur Franceinfo, à la réaction publique d’Alexis Corbière et aux démarches annoncées par LFI et la Grande Mosquée de Paris. L’Arcom disposera des éléments nécessaires pour évaluer si une infraction aux règles de diffusion a été commise et, le cas échéant, décider des suites à donner.





