Manuel Valls, connu pour régler ses différends publiquement plutôt qu’en interne, a choisi de rendre publiques les circonstances de son éviction après avoir été congédié du gouvernement le 12 octobre. Ancien ministre des Outre-mer et ancien premier ministre (2014-2016), il dit sa déception de ne pas avoir pu défendre dans l’Hémicycle « le fameux accord de Bougival pour la Nouvelle-Calédonie », accord dont il se présente comme l’artisan principal.
Un départ attribué à « un mélange de mesquinerie et de cynisme »
Dans une interview au vitriol accordée au magazine Le Point, Manuel Valls attribue son éviction à « un mélange de mesquinerie et de cynisme ». Cette formulation traduit son sentiment d’avoir été écarté pour des raisons politiques internes plutôt que pour des motifs liés à l’exercice de ses fonctions.
Selon ses déclarations, la frustration tient principalement à l’impossibilité de défendre l’accord de Bougival sur lequel il avait misé. Le choix de s’exprimer publiquement illustre, selon lui, l’importance qu’il accorde à ce dossier et le caractère abrupt de sa sortie du gouvernement.
La chronologie des événements
Le récit de Manuel Valls commence une semaine avant la formation du premier gouvernement dirigé par Sébastien Lecornu. Emmanuel Macron l’aurait alors appelé pour lui annoncer qu’il serait renommé et pour lui assurer qu’il croyait en l’accord de Bougival. Manuel Valls a été effectivement reconduit le 5 octobre dans ce gouvernement éphémère, qualifié dans le récit de « Lecornu I ».
Une semaine plus tard, quelques heures avant l’annonce du deuxième gouvernement, Sébastien Lecornu aurait prévenu Manuel Valls, de façon qualifiée de « doucereuse », qu’il ne ferait pas partie du nouvel exécutif et qu’il le regrettait. Cette convocation de dernière minute marque l’amorce de la mise à l’écart qui suit.
Le contexte politique a aussi été façonné par des déclarations publiques du futur premier ministre. Le 13 septembre, Sébastien Lecornu indiquait dans la presse régionale vouloir des « ministres forts ». Dans la logique qu’il a exposée, le renouvellement de l’équipe devait signifier l’écartement des « poids lourds », au profit d’un renouvellement ministériel.
Dans ce cadre, Bruno Retailleau a tiré sa révérence. Les trois autres ministres d’État — Élisabeth Borne, Gérald Darmanin et Manuel Valls — auraient, selon le récit, dû céder leur place. Mais, à la dernière minute, Gérald Darmanin est finalement resté en poste. Rachida Dati, elle aussi, a conservé sa position.
Impacts et interprétations politiques
La séquence décrite par Manuel Valls souligne plusieurs tensions internes : la volonté affichée d’un renouvellement, les arbitrages personnels entre président, premier ministre et ministres, et la manière brusque dont des décisions de portefeuille peuvent être communiquées. Le fait que certains ministres initialement annoncés comme remplaçables soient finalement maintenus invite à s’interroger sur les critères réels qui ont présidé aux choix finaux.
Manuel Valls met en avant le volet programmatique — la défense d’un accord territorial majeur — pour expliquer sa sortie. Sa décision de s’exprimer publiquement plutôt que de rester discret révèle une stratégie visant à préserver son rôle dans le débat sur la Nouvelle-Calédonie et à marquer sa désapprobation face à la manière dont la décision a été prise.
Du point de vue de la communication gouvernementale, cette affaire illustre la difficulté de concilier des objectifs de renouvellement avec la gestion des équilibres politiques et médiatiques. Elle montre aussi que la sortie d’un ministre, même survenue dans un calendrier serré, peut rapidement se transformer en sujet politique s’il choisit de rendre publiques les raisons de son départ.
Enfin, la position de Manuel Valls met en lumière la sensibilité autour de l’accord de Bougival pour la Nouvelle-Calédonie : au-delà des personnalités, c’est le contenu et la portée de cet accord qui semblent avoir pesé dans les ressentis exprimés publiquement.





