Deux jeunes agentes administratives du tribunal judiciaire de Marseille ont été mises en examen vendredi 5 décembre, a appris Le Monde mardi 9 décembre. Elles travaillaient toutes deux dans un service civil du tribunal. Leur implication dans des consultations illégales de fichiers judiciaires apparaît, à ce stade de l’enquête, très différente : occasionnelle pour l’une, massive et lucrative pour l’autre, qui aurait monnayé l’accès à ces données à un interlocuteur proche de la DZ Mafia.
Mesures judiciaires et suites immédiates
La juge d’instruction a placé la première agente sous contrôle judiciaire et lui a imposé une interdiction professionnelle d’exercer. Pour la seconde, le parquet de Marseille avait requis un placement en détention provisoire, mais le juge des libertés et de la détention a opté pour un contrôle judiciaire strict.
Ce contrôle judiciaire interdit à cette deuxième personne de fréquenter le palais de justice de Marseille et lui ferme l’accès à tout emploi dans les ministères de la justice, de l’intérieur et de la défense. Le procureur de la République a fait appel de ce refus de placement sous mandat de dépôt ; l’appel sera examiné prochainement par la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).
Nature des poursuites et étendue des consultations
La seconde agente, décrite dans l’instruction comme vacataire, a été mise en examen pour plusieurs faits : détournement de la finalité de traitement de données à caractère personnel, violation du secret professionnel, et révélation du secret de l’enquête et de l’instruction à une personne susceptible d’être inquiétée.
Selon les éléments communiqués au cours de l’enquête, elle aurait consulté divers fichiers concernant une cinquantaine de profils. Parmi ces consultations, huit concerneraient des dossiers liés à des affaires d’assassinat. Les investigations cherchent à déterminer la finalité de ces consultations et la nature exacte des informations communiquées à des tiers.
Liens avec des personnes proches de la DZ Mafia
L’enquête a établi des liens entre l’une des agentes et un ex-petit ami qui, bien que connu principalement pour des violences conjugales, est le cousin de Mehdi Laribi, dit « Tic ». La police judiciaire présente Mehdi Laribi comme le patron de la DZ Mafia.
Ce même ex-petit ami est également lié à un narcotrafiquant de premier plan, actuellement en fuite après une permission de sortie, selon les investigations. Le jeune homme proche de l’agente a été mis en examen notamment pour corruption passive et association de malfaiteurs. Placé sous contrôle judiciaire malgré les réquisitions d’un mandat de dépôt, il fait lui aussi l’objet d’un appel du parquet.
Enquête en cours et éléments à vérifier
Les informations révélées à ce stade proviennent des actes et des décisions de la procédure, ainsi que des révélations rapportées par Le Monde le 9 décembre. Les mises en examen concernent des infractions précises liées à l’accès et à la transmission de données judiciaires protégées.
Les magistrats cherchent à préciser la chronologie des faits, l’identité exacte des personnes auxquelles les informations ont été transmises et l’ampleur financière éventuelle des opérations alléguées. Le dossier inclut des mesures judiciaires et des réquisitions différentes selon les personnes mises en cause, ce qui traduit la distinction opérée par l’instruction entre un comportement opportuniste et des pratiques plus organisées.
Contexte et conséquences institutionnelles
La révélation selon laquelle des fichiers internes du tribunal auraient été consultés et, pour l’une des prévenues, monnayés, pose des questions sur les contrôles d’accès aux bases de données judiciaires et sur la prévention des détournements d’informations sensibles.
Sur le plan disciplinaire et administratif, les mesures d’interdiction d’exercer et l’interdiction d’emploi dans certains ministères montrent que les autorités ont déjà mis en place des verrous préventifs en attendant les suites de la procédure pénale. Les recours exercés par le parquet contre les décisions de non-placement en détention traduisent la volonté du ministère public d’obtenir des réponses judiciaires plus contraignantes.
Les développements prochains — notamment l’appel du procureur devant la chambre de l’instruction et l’avancée des investigations sur les liens entre les mis en examen et des réseaux criminels — détermineront l’orientation et l’ampleur des poursuites. Pour l’heure, l’information publiée par Le Monde sert de cadre factuel aux éléments rendus publics par la justice.





