Le spectre d’une dissolution de l’Assemblée nationale est réapparu au-dessus du Palais-Bourbon après la démission du gouvernement présidé par François Bayrou, défait lors du vote du 8 septembre.
Contexte constitutionnel et antécédents récents
Cette hypothèse n’était pas nouvelle : elle avait déjà resurgi le 8 juillet, date à laquelle le président de la République avait retrouvé l’exercice de certains pouvoirs constitutionnels, un an après les élections législatives anticipées de 2024. Dans un entretien accordé au magazine Paris Match en août, Emmanuel Macron avait relativisé la probabilité d’une dissolution, mais la possibilité demeure présente dans le débat politique.
La fragilité gouvernementale et la configuration parlementaire restent au cœur de l’inquiétude. Lorsque l’exécutif perd une motion ou un vote clef, la Constitution offre au président la marge de manœuvre de recourir à la dissolution. Le recours à cet outil dépend cependant d’un arbitrage politique lourd, incluant l’évaluation du risque électoral et la capacité de recomposer une majorité.
Comportement des députés : vigilance et proximité
Face à cette incertitude, de nombreux députés ont choisi de réduire la durée de leurs vacances et de rester à proximité de leur circonscription. L’activité parlementaire, réduite ces derniers jours, a encouragé des déplacements sur le terrain et des rencontres avec les électeurs, dans l’objectif de consolider un ancrage local en cas d’élection anticipée.
Ce comportement traduit une stratégie de préparation à plusieurs scénarios : maintien du gouvernement, recomposition parlementaire ou, plus radicalement, convocation des électeurs par une dissolution. Les parlementaires expliquent publiquement préférer la proximité, mais ils agissent aussi en anticipant les besoins logistiques et électoraux d’une campagne courte et soudaine.
Nomination de Sébastien Lecornu et renforcement des craintes
La nomination de Sébastien Lecornu au poste de Premier ministre, le mardi 9 septembre, a intensifié ces inquiétudes. Pour certains observateurs et responsables politiques, l’arrivée d’un nouveau chef de gouvernement macroniste pourrait ne pas suffire à assurer une majorité stable, surtout si les divisions internes persistent.
Un scénario redouté est celui d’un projet de loi de finances ou d’un budget rejeté ou censuré : l’échec budgétaire d’un nouveau gouvernement pourrait alors aiguiller l’exécutif vers une dissolution, perçue comme un moyen de clarifier la situation politique et de tenter d’obtenir une nouvelle majorité parlementaire.
Scénarios possibles et variables à surveiller
Plusieurs facteurs détermineront si la menace de dissolution se concrétise. D’une part, la capacité du Premier ministre à rassembler des soutiens au sein de la majorité et à négocier avec les groupes parlementaires disséminés. D’autre part, l’ampleur des tensions sur des textes budgétaires ou des motions de censure qui pourraient mettre en difficulté l’exécutif.
Enfin, la décision présidentielle reste centrale : elle suppose une évaluation politique du moment opportun pour dissoudre et une appréciation des risques électoraux. Dissoudre l’Assemblée entraîne des enjeux considérables pour le camp au pouvoir, notamment le risque de perdre des sièges acquis lors d’élections précédentes.
En l’état, la menace pèse davantage comme une option à l’agenda politique que comme une certitude immédiate. Les prochains votes au Palais-Bourbon, la capacité du gouvernement à faire adopter son budget et la teneur des alliances parlementaires seront des indicateurs clés pour mesurer la probabilité d’une dissolution.