Nouméa : tribunal administratif exige des améliorations au centre pénitentiaire Camp‑Est, 2 000 € par détenu mais sans solution à la surpopulation

Share This Article:

Le tribunal administratif de Nouvelle‑Calédonie a ordonné, le 28 octobre, des mesures urgentes au centre pénitentiaire Camp‑Est (Nouméa) — amélioration des installations pour les détenus dormant sur matelas au sol, lutte contre les nuisibles et séparation des blocs sanitaires — après une requête collective de 50 détenus jugeant les conditions contraires à la dignité humaine. L’État devra verser 2 000 € par plaignant, mais aucune astreinte n’a été fixée et le juge n’a pas imposé un lit par détenu, laissant entière la question de la surpopulation carcérale.

Le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a enjoint, mardi 28 octobre, à l’administration pénitentiaire de prendre des mesures urgentes pour améliorer les conditions de détention au centre pénitentiaire de Camp-Est, à Nouméa, estimées contraires à la dignité humaine.

Les mesures demandées par le tribunal

Dans une ordonnance rendue à la suite d’une procédure inédite introduite par 50 détenus, le juge des référés a jugé que la surpopulation et l’insalubrité du centre « portent une atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas subir des traitements inhumains ou dégradants ».

Le président du tribunal a enjoint à l’administration « de prendre toutes les mesures qui apparaîtraient de nature à améliorer les conditions matérielles d’installation des détenus dormant sur des matelas posés à même le sol ». Il a également ordonné, « dans les plus brefs délais », de « remédier à la présence excessive de nuisibles » et « d’assurer la séparation du bloc sanitaire dans les cellules partagées ».

Par ailleurs, l’État a été condamné à verser 2 000 euros à chacun des 50 plaignants au titre des frais de procédure.

Des avancées partielles

La décision apporte des mesures concrètes visant l’amélioration matérielle des cellules et la santé des détenus, mais elle comporte aussi des limites notables. Le tribunal n’a pas assorti ses injonctions d’astreinte, ce qui signifie qu’il n’a pas fixé de sanction financière automatique si l’administration n’exécute pas rapidement l’ordonnance.

De même, le juge des référés n’a pas exigé qu’un lit soit attribué à chaque détenu, contrairement à la demande des requérants. Le président du tribunal a estimé que la surpopulation carcérale, « pour inadmissible que soit celle‑ci », ne relevait pas du juge des référés « compte tenu de l’ampleur du phénomène » et « de ce que l’administration pénitentiaire ne dispose d’aucun pouvoir de décision en matière de mises sous écrou ».

Conditions dénoncées et constats

Lors de l’audience du 22 octobre, la direction du Camp-Est avait reconnu que certaines cellules de 10 à 12 mètres carrés abritaient jusqu’à cinq détenus pour deux lits. La présence récurrente de nuisibles — cafards, rats, scolopendres — y a également été constatée par l’administration.

Ces éléments ont servi de fondement à la requête collective portée devant le tribunal administratif. L’originalité de la procédure tient au nombre des requérants et à la rapidité de l’examen en référé, voie dédiée aux situations d’urgence.

Le Camp-Est a déjà été épinglé à plusieurs reprises par la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté. Il avait fait l’objet, en 2023, de condamnations pour non‑exécution de travaux antérieurement ordonnés par la justice.

Réactions et portée juridique

Me Charly Salkazanov, avocat des détenus, s’est félicité auprès de l’Agence France‑Presse (AFP) : « C’est une victoire pour les détenus du centre pénitentiaire de Nouméa. Le juge a reconnu l’indignité de leurs conditions de détention (…) L’union des détenus a fait la force. »

Pour autant, la décision laisse subsister des questions pratiques et juridiques. L’absence d’astreinte réduit la contrainte immédiate sur l’administration, et la reconnaissance par le juge que la question de la surpopulation dépasse le cadre du référé pose la problématique de solutions structurelles, qui relèvent d’acteurs administratifs et politiques compétents en matière d’écrou et de politiques pénitentiaires.

Sur le plan des droits fondamentaux, l’ordonnance constitue néanmoins une reconnaissance formelle par une juridiction administrative d’un état de fait attentatoire à la dignité des personnes détenues. Elle impose à l’administration des obligations précises en matière d’hygiène et d’aménagement des espaces collectifs.

Enfin, la condamnation de l’État au versement de 2 000 euros à chaque plaignant formalise la réparation des frais de procédure, même si elle ne compense pas directement les conditions matérielles dénoncées par les détenus.

La mise en œuvre effective des mesures ordonnées, leur calendrier et l’éventuelle saisine d’autres juridictions ou autorités administratives resteront des éléments déterminants pour apprécier l’impact concret de cette décision sur la vie quotidienne des personnes détenues au Camp-Est.

Parlons Politique

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Subscribe To Our Newsletter

No spam, notifications only about new products, updates.

[contact-form-7 id="b565394" title="Untitled"]

L’actu politique, sans détour

En bref

Parlons Politique décrypte l’actualité française et internationale avec clarté et précision en utilisant l’IA.

Analyses, débats et enquêtes : notre rédaction s’engage à vous offrir une information fiable, accessible à tous et sans détour.

© 2025 Parlons Politique