Quatorze heures ont séparé les deux derniers communiqués émis par le service de presse de l’Élysée, aboutissant à un retournement institutionnel rare : le Premier ministre Sébastien Lecornu, nommé le 9 septembre, a « remis la démission de son gouvernement au président de la République, qui l’a acceptée ». Le premier message, envoyé aux rédactions le dimanche 5 octobre à 20 heures, détaillait la composition d’un nouveau cabinet ; le second, transmis le lundi aux alentours de 9h50, annonçait la démission.
Le calendrier : de la nomination à la démission
La chronologie est singulière. Sébastien Lecornu avait été nommé Premier ministre le 9 septembre. Vingt-six jours se sont écoulés entre cette nomination et l’annonce, le dimanche 5 octobre au soir, de la composition de son gouvernement. Dans la matinée suivante, la démission de cette équipe a été rendue publique et acceptée par le président.
Selon le communiqué cité, l’entourage du Premier ministre a expliqué vouloir « prendre le temps consulter toutes les forces politiques et syndicales, afin de s’accorder sur le quoi avant le qui ». La formulation, rapportée par ses proches, indique que l’objectif prioritaire était de trouver des compromis sur le budget 2026 avant de dévoiler définitivement les personnalités du cabinet.
Une composition largement reconduite
Le gouvernement présenté le 5 octobre comptait 18 ministres. Parmi eux, 12 étaient déjà en poste dans l’équipe précédente dirigée par François Bayrou (en poste de décembre 2024 à septembre 2025). Seuls deux nouveaux visages ont été introduits : Mathieu Lefèvre (Renaissance), nommé ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, et Naïma Moutchou (Horizons), nommée ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, de l’Intelligence artificielle et du Numérique.
Quatre anciens ministres ont également réintégré le gouvernement. Parmi eux figurait Bruno Le Maire, ancien chef du ministère de l’Économie et des Finances de 2017 à 2024, revenu avec des attributions liées aux Armées et aux Anciens combattants. Le texte précise toutefois que la nomination de Bruno Le Maire n’est pas passée inaperçue et a suscité des réactions vives.
La composition annoncée n’a pas pleinement répondu aux attentes de renouvellement affichées par Sébastien Lecornu. Celui-ci avait promis « des ruptures, aussi sur le fond », mais le renouvellement des personnalités au pouvoir n’a pas été jugé profond : 12 des 18 membres étaient des ministres déjà en poste.
Réactions politiques et tensions au sein de la majorité
Plusieurs responsables ont exprimé leur déception. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur reconduit, a regretté que « la composition du gouvernement ne reflète pas la rupture promise ». De son côté, pour une partie de l’opposition et des observateurs, le retour de Bruno Le Maire a été perçu comme un signal contradictoire, certains y voyant un élément de tension budgétaire pour l’avenir du pays.
Le président du groupe LR a convoqué en urgence une réunion des responsables Républicains le lundi matin afin de statuer sur la stratégie à adopter. Les réserves au sein de la droite parlementaire se sont accrues, notamment face à la perspective d’une motion de censure née d’un front unissant la gauche et l’extrême droite.
Conséquences institutionnelles et prochaines étapes
Avec l’acceptation de la démission, le gouvernement Lecornu est désormais démissionnaire. Il demeure en charge des affaires courantes en attendant la nomination d’un nouveau Premier ministre, puis la formation d’un nouveau gouvernement. Le président de la République doit à présent soit nommer un nouveau chef du gouvernement, soit dissoudre l’Assemblée nationale en vue d’élections législatives anticipées, selon les options évoquées publiquement.
La situation politique reste donc incertaine. L’issue dépendra des consultations à venir et des arbitrages présidentiels. Les éléments déjà rendus publics — le calendrier, la composition déclarée et les réactions politiques — donnent la mesure d’une crise gouvernementale rapide et peu commune dans l’histoire récente.
Cette synthèse reprend les informations figurant dans les communiqués du service de presse de l’Élysée et les déclarations rapportées par l’entourage du gouvernement au moment des annonces.