Sénat tacle le projet de loi contre la vie chère en outre‑mer : mesures jugées cosmétiques, appel à réformes sur les approvisionnements et la réorganisation des flux

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Examiné au Sénat le 28 octobre, le projet de loi visant à lutter contre la « vie chère » en outre‑mer suscite de fortes réserves : la commission des affaires économiques juge ses mesures cosmétiques et insuffisantes face à des causes structurelles (logistique, dépendance aux circuits hexagonaux). Les sénateurs rappellent les écarts de prix (Insee : +30–42 % pour l’alimentaire) et appellent à des réformes ambitieuses sur les approvisionnements régionaux et la réorganisation des flux.

Examiné mardi 28 octobre en séance au Sénat, le projet de loi présenté comme une réponse à la « lutte contre la vie chère » dans les territoires ultramarins a été accueilli par de fortes réserves des parlementaires, qui ont suivi les critiques venues des élus locaux ces derniers mois. Remis par l’ancien ministre des Outre-mer Manuel Valls à sa successeure Naïma Moutchou, le texte a été particulièrement sévèrement commenté par la commission des affaires économiques du Sénat lors de sa réunion du 22 octobre.

Des critiques sévères sur l’efficacité des mesures

La commission présidée par la sénatrice LR des Alpes-Maritimes, Dominique Estrosi Sassone, a estimé que, malgré la communication gouvernementale présentant le projet comme « une initiative majeure » pour le pouvoir d’achat en outre‑mer, « les différentes mesures proposées, même cumulées, ne devraient avoir qu’un effet mineur sur la formation des prix en outre‑mer ». Cette conclusion a été portée par les deux rapporteurs ultramarins du texte, Micheline Jacques (LR, Saint‑Barthélémy) et Frédéric Buval (membre du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, Martinique).

À la commission, l’avis s’est montré transversal : sénateurs de gauche comme de droite ont qualifié certaines dispositions de « décevantes », « disparates » ou « cosmétiques ». Les critiques ciblent principalement le manque d’ambition et la dispersion des mesures, perçues comme insuffisantes pour traiter un problème jugé structurel et ancien.

Des causes identifiées comme structurelles

Les parlementaires ont souligné que le projet n’attaque pas assez les causes profondes du surcoût en outre‑mer. Ils mettent en avant des facteurs organisationnels et logistiques : la faible insertion régionale des territoires, les coûts de transport et des circuits d’approvisionnement souvent dépendants de l’Hexagone. Une image reprise par plusieurs sénateurs : tant que des produits, comme les citrons verts en provenance du Brésil, doivent transiter par le marché international de Rungis (Val‑de‑Marne) pour être ensuite livrés en Guyane, les marges et les prix resteront élevés.

Les intervenants rappellent également l’enchaînement législatif qui, malgré plusieurs lois, n’a pas résolu le problème : la loi pour le développement économique des outre‑mer (2009), la loi Lurel sur la régulation économique (2012) et la loi sur l’égalité réelle (2017). Selon la commission, ces dispositifs n’ont pas suffi à transformer des relations économiques héritées de plusieurs siècles entre l’Hexagone et ses outre‑mer.

Mesures chiffrées et perception sociale

La persistance de la « vie chère » figure parmi les principaux motifs d’insatisfaction des populations ultramarines, notamment en Guadeloupe et à La Réunion. La dernière grande enquête de l’Insee, menée en 2022, rappelle des écarts de prix significatifs : entre 30 % et 42 % de plus en moyenne pour l’alimentaire, et entre 9 % et 16 % pour l’ensemble des biens, par rapport à l’Hexagone. Ces chiffres ont servi de référence tout au long des débats pour mesurer l’ampleur du déséquilibre.

Pour la commission, ces chiffres soulignent la limite d’un projet de loi qui ne s’attaque pas frontalement aux mécanismes économiques ni aux ruptures logistiques à l’origine des écarts.

Un texte jugé « perfectible » et les suites attendues

Les sénateurs ont résumé leur position en estimant que le projet demeure « perfectible ». Certains ont insisté sur la nécessité d’une approche plus structurante, qui associerait politiques publiques, réorganisation des flux commerciaux et mesures incitatives pour renforcer les approvisionnements régionaux.

La commission a mis en garde contre de fausses attentes : « la commission ne souhaite pas donner de faux espoirs aux populations ultramarines et rappelle qu’une loi ne pourra pas venir transformer un système économique qui est l’héritage de plusieurs siècles de relations entre l’Hexagone et ses outre‑mer et la conséquence des caractéristiques propres de ces territoires. »

Reste à savoir quelles modifications seront proposées en séance publique et si le gouvernement choisira d’amender le texte pour en renforcer l’impact structurel. Les débats parlementaires à venir devront préciser si l’exécutif accepte les réserves exprimées par la commission et si des mesures complémentaires — notamment sur la logistique régionale et les circuits d’approvisionnement — seront intégrées.

En l’état, les critiques sénatoriales invitent à la prudence quant à l’effet réel du projet sur le pouvoir d’achat des Ultramarins, et rappellent que des solutions durables nécessitent un travail de fond au‑delà d’un simple texte législatif.

Parlons Politique

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