Le député du Val‑d’Oise Carlos Martens Bilongo (La France insoumise) a dénoncé, mardi 21 octobre, « un scandale d’État » et une « ingérence étrangère » après la publication d’une enquête du média d’investigation L’Informé. Selon ce média, une note de la cellule de renseignement financier de Bercy — Tracfin — le visant contenait de nombreuses erreurs, ce que déplore l’élu.
Les origines de l’affaire et la chronologie
Le député, coauteur d’un rapport parlementaire en mars 2023 sur l’organisation de la COP28 aux Émirats arabes unis à Dubaï, affirme avoir fait l’objet d’une « cabale » au retour de ce déplacement. « J’avais émis des critiques par rapport à l’organisation. S’en est suivie à mon retour en France une cabale contre ma personne avec une fausse note qui a été faite par les services économiques de Bercy », a‑t‑il déclaré en conférence de presse à l’Assemblée nationale.
Selon le dossier média, Tracfin se serait penché sur la situation financière du député « dans la foulée de la publication du rapport », et ce « sans qu’aucune déclaration de soupçon ne lui ait été adressée ». L’Informé avance que « l’alerte vient donc vraisemblablement d’une autre administration ou directement des EAU [Émirats arabes unis] », après avoir consulté « la note complète » de Tracfin.
Une enquête judiciaire avait été ouverte mi‑avril 2023 à l’encontre de M. Martens Bilongo pour fraude fiscale et blanchiment de capitaux, à la suite d’un signalement de Tracfin. Cette enquête a finalement été classée sans suite en janvier 2025.
Contenu contesté de la note et allégations de L’Informé
L’Informé affirme que la note interne de Tracfin comporterait « une série de bourdes assez invraisemblables, peu explicables sauf à être intentionnelles ». Le média donne, en exemple, une confusion entre impôt sur le revenu et impôt sur les sociétés. Ces éléments figurent dans l’enquête publiée par L’Informé, qui présente et commente la note que le journal dit avoir consultée.
Le chef de Tracfin, Guillaume Valette‑Valla, a été remplacé à la tête du service en février 2024. Le compte rendu du conseil des ministres indique que la fin de ses fonctions est intervenue « à sa demande ». Toujours selon L’Informé, M. Valette‑Valla se serait rendu à Dubaï « quelques jours » après une visite sur place de députés français, dont M. Bilongo, et un article du même média évoquait un rapport interne très critique sur sa gestion quelques jours avant ce départ.
Réponses du gouvernement et de Tracfin
Lors de la séance des questions au gouvernement, Carlos Martens Bilongo s’est adressé à la ministre chargée des comptes publics, Amélie de Montchalin, pour dénoncer de nouveau « un scandale d’État ». La ministre a rappelé que le gouvernement ne pouvait « entrer dans les détails d’un dossier à partir du moment où l’autorité judiciaire s’en est saisie » et a rappelé que l’enquête préliminaire avait duré deux ans.
Amélie de Montchalin a précisé que « il y a eu une déclaration de soupçon qui a été adressée par une entité assujettie en France (…) Tracfin n’a pas travaillé à la demande d’une autorité étrangère, et l’identité de l’auteur de cette déclaration ne peut être révélée. Ce serait un délit ». Elle a ajouté que « le traitement appliqué par Tracfin dans cette affaire est en tout point similaire à celui appliqué aux autres signalements reçus par le service ».
La ministre a aussi rappelé le rôle de Tracfin : saisir l’autorité judiciaire « quand son enquête démontre que les soupçons sont fondés ». Dans ce cas, a‑t‑elle souligné, « le parquet décide seul de l’opportunité des poursuites, et ces principes ont été respectés ».
Points à clarifier
Les éléments publiés par L’Informé, repris par le député, posent plusieurs questions factuelles sur l’origine de la déclaration de soupçon et sur le contenu exact de la note interne. Les autorités judiciaires et la cellule antiblanchiment sont tenues au secret sur l’identité du déclarant et sur certains éléments d’enquête, ce qui limite la possibilité de vérifier publiquement toutes les affirmations avancées.
L’affaire mêle des décisions administratives, un signalement financier, une enquête judiciaire classée sans suite et des allégations de défaillance dans un rapport interne. Les principales dates connues sont : la publication du rapport parlementaire en mars 2023, l’ouverture d’une enquête mi‑avril 2023, le remplacement du chef de Tracfin en février 2024 et le classement sans suite en janvier 2025.
Le débat politique et judiciaire autour de cette affaire devrait se poursuivre, entre demandes de transparence de certains élus et réserves des autorités sur la confidentialité des procédures de renseignement financier.