Un itinéraire politique lié aux débuts du Front national
Alain Jamet, compagnon de route de Jean‑Marie Le Pen depuis les « années Poujade », est décédé le 28 novembre à l’âge de 91 ans, dans l’Hérault, département qu’il avait choisi comme terre d’élection. Cofondateur du Front national (FN, ancêtre du Rassemblement national), il a incarné pendant des décennies la fidélité à l’extrême droite française, sans parvenir à accéder aux plus hautes responsabilités nationales.
Ancien parachutiste et militant de l’Algérie française, Jamet a consacré sa vie politique à soutenir ce que le milieu le décrivait comme « le diable de la République », en espérant le retour de l’extrême droite aux affaires en France. Malgré cet engagement de longue haleine, il n’a pas dépassé le stade de conseiller régional, poste auquel il a siégé mais qui, selon plusieurs témoignages du cercle politique dont il faisait partie, n’a pas suffi à récompenser la longévité de sa fidélité au parti.
Un engagement précoce et une fidélité inébranlable
Impliqué dès les débuts du mouvement poujadiste, Jamet s’est rapidement orienté vers les structures qui ont ensuite fondé le Front national. Son profil — vétéran parachutiste et militant pour l’Algérie française — correspondait à une frange de la droite nationaliste des décennies suivantes, où se mêlaient questions identitaires, expérience militaire et rejet de la décolonisation telle qu’elle se déroulait à l’époque.
Sa trajectoire illustre la permanence de réseaux et d’affinités politiques qui ont traversé la vie politique française depuis les années 1950‑1960. Elle montre également la difficulté qu’ont rencontrée certains cadres historiques du mouvement à transformer leur ancienneté et leur loyauté en carrières électives de niveau national.
Une enfance marquée par la controverse familiale
Alain Jamet était le fils de l’homme de lettres Claude Jamet. Le parcours de son père a laissé une empreinte durable sur la famille : socialiste et pacifiste de formation, Claude Jamet s’est rallié à la collaboration à partir de 1942, une période qui a profondément marqué la mémoire familiale.
Alain avait 10 ans quand il a découvert le parloir de Fresnes (Val‑de‑Marne), où se retrouvaient des proches de personnes incarcérées pour collaboration. Son père a été libéré après trois mois de détention mais, comme le rapporte le récit familial, il a ensuite souffert d’une forme de « mort sociale ». Plus tard, il est dit qu’il est retourné travailler dans les sous‑sols du Figaro, où ses trois fils et sa fille se rendaient occasionnellement.
Le foyer familial, situé rue Vavin dans le 6e arrondissement de Paris, est décrit comme morose : soutien affiché au Maréchal, frigo souvent vide, un père réputé volage et une belle‑mère qualifiée d’acariâtre et jalouse. Ces éléments biographiques, rapportés dans le portrait original, dessinent le climat intime et les tensions qui ont pu influencer le parcours et les choix d’Alain Jamet.
Un legs politique et une reconnaissance inégale
Au moment de sa mort, Alain Jamet laisse le souvenir d’un militant de longue date, aux positions radicales et constantes. Son rôle dans la fondation du Front national le place parmi les acteurs historiques de l’extrême droite française, même si son influence n’a pas nécessairement été proportionnelle à celle de certains dirigeants du mouvement.
Portrait d’un homme dont la vie politique et familiale porte les traces des convulsions du XXe siècle français, ce bilan souligne la complexité des héritages idéologiques transmis au sein des familles et des partis. Jamet illustre comment fidélité et militantisme ne garantissent pas toujours l’ascension politique, et comment des trajectoires individuelles s’inscrivent dans des histoires collectives plus larges, marquées par la guerre, la mémoire et la recomposition politique.





