Une visite attendue au Salon du patrimoine
Elle s’était d’abord annoncée en milieu de matinée. C’est finalement à midi que Marine Le Pen a débarqué, vendredi 24 octobre, au Salon international du patrimoine culturel, qui se tient jusqu’à dimanche au Carrousel du Louvre, à Paris.
La visite a attiré l’attention parce que le Salon, rendez-vous professionnel et grand public, concentre chaque année des acteurs de la conservation, des collectivités territoriales et des fondations. La veille, Brigitte Macron s’était rendue de manière discrète sur le même salon, ce qui a contribué à renouveler l’intérêt médiatique pour la présence de personnalités politiques.
Le patrimoine, cheval de bataille du Rassemblement national
Le Rassemblement national fait du patrimoine son principal argument culturel. Le parti promet de tripler les crédits destinés à la conservation pour porter le budget à un milliard d’euros s’il accède au pouvoir, une promesse régulièrement mise en avant dans sa communication.
Dans un livret de vingt pages, qualifié de « à connotation identitaire », publié lors de la présidentielle de 2022, Marine Le Pen définissait le patrimoine comme « notre histoire pétrifiée, au sens premier de cet adjectif » et lui attribuait un rôle dans le « redressement moral du pays ». Ces formulations ont servi de fil conducteur aux prises de parole du parti sur ce sujet.
Sur place, la candidate est venue principalement pour écouter, plutôt que pour annoncer de nouvelles mesures. Sa présence a toutefois été perçue comme une confirmation de l’importance stratégique que le RN accorde à la question patrimoniale dans son projet politique.
Rencontre avec la Sauvegarde de l’art français
Escortée par son directeur de cabinet, Ambroise de Rancourt, et par le député du Nord Sébastien Chenu, Marine Le Pen s’est longuement attardée sur le stand de la Sauvegarde de l’art français. Cette fondation, active depuis un siècle, intervient notamment pour aider à la conservation des églises et chapelles.
Le président de la fondation, Olivier de Rohan-Chabot, a déclaré : « Je suis républicain, je reçois tout le monde. J’aurais pu dire que j’étais malade, ce qui est le cas, mais je n’ai pas ces lâchetés-là. J’accueillerais tout autant Jean-Luc Mélenchon. J’invite tous les leaders à venir, ils seront bien reçus. » Son propos vise à souligner l’ouverture institutionnelle de la structure malgré les clivages politiques.
La scène renvoie à un dilemme fréquent pour les acteurs du patrimoine : conserver une posture de neutralité institutionnelle tout en accueillant des représentants politiques qui peuvent instrumentaliser la question à des fins électorales.
Une visite plutôt symbolique que programmatique
Sur le salon, la tonalité de la visite est restée symbolique. Marine Le Pen a parcouru des stands et écouté des responsables d’associations, sans présenter de nouveau plan chiffré ni de calendrier d’action concrète. Cette attitude contraste avec la mise en avant chiffrée du parti sur le terrain budgétaire.
Pour les observateurs, le geste se lit comme une tentative de légitimation politique par la proximité avec des acteurs historiques de la conservation. Le patrimoine, en tant que thème culturel porteur, offre une visibilité et un cadre de discours propices aux enjeux d’identité politique.
À défaut d’annonces, la visite a permis de mesurer la porosité entre monde associatif et sphère politique lorsque le sujet touche à la mémoire et aux édifices religieux. Les réactions locales et la suite politique de cette attention portée au patrimoine dépendront des initiatives concrètes présentées ultérieurement par les partis et les collectivités.
La journée au Carrousel du Louvre a donc donné lieu à une opération de présence et d’écoute, inscrite dans une stratégie plus large où le patrimoine sert d’axe central de communication. Les acteurs patrimoniaux, eux, rappellent la nécessité de préserver des savoir-faire et des financements pérennes, quelle que soit leur affinité politique.





