Dans un long texte publié en juillet par Le Nouvel Observateur, l’écrivain Emmanuel Carrère décrit les coulisses du sommet du G7 tenu au Canada et livre ses impressions sur certains dirigeants présents. Son récit, mêlant observation personnelle et jugement critique, s’attarde notamment sur une rencontre qui a suscité chez lui un « infime cas de conscience » : Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien.
Une impression personnelle au cœur du G7
Carrère confie qu’il est conscient du contexte politique entourant Giorgia Meloni. « Je sais que Meloni est considérée comme d’extrême droite et qu’il ne faut pas dire du bien d’elle », écrit-il, reconnaissant d’emblée le poids des représentations et des étiquettes politiques. Malgré cette mise en garde, son portrait se teinte d’éléments sensibles et esthétiques : il évoque « sa robe bleu ciel, très légère [qui] avait presque l’air d’une robe de plage » et note une « rudesse enjouée » qui le séduit.
Ces observations mêlent l’anecdote et l’appréciation personnelle. Carrère précise ensuite la nature de son attirance : il dit éprouver de la sympathie pour la présidente du conseil, en partie séduite par son « côté divertissant », ses mimiques expressives et ses fameux roulements d’yeux. L’écrivain questionne enfin sa propre réaction, se demandant s’il aurait perçu de la même manière Marine Le Pen s’il avait été étranger.
Un passé politique rappelé sans concession
Le texte ne se contente pas d’un portrait de salon. Carrère rappelle également un élément souvent invoqué dans les débats publics : il y a trente ans, Giorgia Meloni était, selon l’auteur, une militante néofasciste active dans les périphéries de Rome, exprimant son admiration pour Benito Mussolini (1883-1945). Il décrit son parcours comme celui d’une « politicienne professionnelle » qui a su s’imposer au sein d’une famille politique autrefois marginale et la conduire jusqu’au pouvoir.
Cette synthèse établit un fil narratif qui relie un passé idéologique controversé à une trajectoire d’ascension politique. L’auteur souligne que, malgré les origines de son engagement, Meloni a réussi à obtenir une reconnaissance à la fois nationale et internationale, ce qui la place désormais au centre de décisions et d’alliances européennes.
Une figure devenue modèle pour certaines droites
Dans son analyse, Carrère note que la progression de Giorgia Meloni a d’autres retombées : son accession au pouvoir et la visibilité qu’elle a acquise ont fait d’elle « un modèle auquel les droites françaises rêvent », écrit-il. Il ajoute que son image internationale et la « stabilité de son gouvernement » peuvent inspirer de l’espoir chez des forces politiques cherchant une figure à la fois ferme et capable de gouverner.
Ce constat est présenté comme une lecture politique plutôt que comme une affirmation factuelle nouvelle. L’argument met en relation perception médiatique et positionnement stratégique, sans détailler ici les mécanismes concrets ou les acteurs spécifiques qui contribueraient à cette admiration.
Tout au long de son texte, l’écrivain alterne entre description intime et jugements de portée politique. Il ne masque pas la tension entre la pertinence d’un regard esthétique et la responsabilité d’un observateur face à des trajectoires idéologiques discutées publiquement.
Le récit illustre enfin une question plus large : comment concilier l’évaluation personnelle d’un dirigeant et la nécessaire lucidité sur son passé et ses positions politiques ? Carrère pose cette interrogation en termes biographiques et moraux, laissant au lecteur le soin d’apprécier la dualité entre séduction personnelle et enjeu démocratique.