Ilan Volson-Derabours : urgence de constitutionnaliser l’indépendance du parquet avant 2027 face à la montée de l’extrême droite

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En juillet 2022, un « stress test autocratique » commandé par les écologistes au Parlement européen a conclu que la France serait mal préparée à un démantèlement coordonné des contre‑pouvoirs, ciblant en particulier l’inégalité de garanties entre magistrats du siège et magistrats du parquet. S’appuyant sur des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, le rapport alerte sur la dépendance du parquet à l’exécutif et recommande, avant la présidentielle de 2027, la constitutionnalisation de son indépendance et l’ouverture d’un débat parlementaire urgent pour protéger les droits fondamentaux et les mécanismes démocratiques.

Le rapport de juillet 2022 et son constat

En juillet 2022, le groupe écologiste au Parlement européen a commandé un rapport évaluant la capacité du système juridique français à résister à un éventuel « choc autoritaire ».

Les professeurs de droit et juristes missionnés ont soumis la France à ce qu’ils ont qualifié de « stress test autocratique » et ont rendu un diagnostic sans équivoque : le pays serait mal préparé à faire face à un processus coordonné de démantèlement des contre‑pouvoirs engagé par une majorité autoritaire.

Cet avertissement, qui aurait pu déclencher un débat institutionnel dès 2022, est resté largement oublié. Aucun travail parlementaire d’ampleur n’en a découlé, alors que la trajectoire politique du pays suscite désormais des échanges publics tendus autour des garanties démocratiques.

Un déséquilibre entre siège et parquet

La question centrale soulignée par le rapport porte sur l’indépendance des magistrats, et plus particulièrement sur la différence de statut et de protection entre magistrats du siège et magistrats du parquet.

En France, l’indépendance des juges du siège est théoriquement garantie et, selon le rapport, demeure effectivement assurée malgré des polémiques publiques récentes concernant certaines décisions médiatisées.

En revanche, la situation des magistrats du parquet — procureurs, procureurs adjoints et substituts — est différente. Chargés d’engager les poursuites au nom de la société, ces magistrats ne bénéficient pas des mêmes garanties d’indépendance vis‑à‑vis du pouvoir exécutif.

La Cour européenne des droits de l’homme l’a rappelé à plusieurs reprises, notamment dans deux arrêts de 2010 (Medvedyev et Moulin), en jugeant que des insuffisances de garanties pouvaient empêcher de considérer le parquet comme de véritables « autorités judiciaires » en matière d’indépendance et d’impartialité.

Selon le rapport et les jurisprudences citées, cette dépendance se manifestait sur deux plans : d’une part, la nomination et la gestion de carrière des procureurs ; d’autre part, les consignes ou orientations que l’exécutif pouvait leur adresser, parfois de façon directe.

Les risques identifiés et la réponse attendue

Les auteurs du rapport ont estimé que, sans modifications institutionnelles, la France s’exposait à un affaiblissement des contre‑pouvoirs comparable à celui observé dans d’autres pays européens ces dernières années, citant en particulier les trajectoires politiques de la Hongrie et de la Pologne.

Pour contrer ce risque, le texte recommandé insiste sur la nécessité d’ériger des garde‑fous institutionnels avant l’échéance présidentielle de 2027. Au premier rang des propositions figurait la constitutionnalisation de l’indépendance du parquet, afin d’inscrire dans le bloc de constitutionnalité des garanties renforcées pour les magistrats chargés des poursuites.

Le rapport considérait ces mesures comme urgentes : agir avant la prochaine présidentielle permettrait, selon ses auteurs, de préserver des marges de manœuvre démocratiques si une majorité hostile aux contre‑pouvoirs venait à gouverner.

Enjeux démocratiques et recommandations générales

La principale leçon de ce diagnostic tient à la fragilité de certaines garanties procédurales face à des volontés politiques déterminées. La protection des droits fondamentaux repose non seulement sur des textes, mais aussi sur des mécanismes institutionnels efficaces et reconnus.

Sans préconiser de solutions techniques détaillées dans cet article, le rapport met en lumière l’urgence d’un débat parlementaire sur la nature et l’étendue des garanties à donner au parquet. Ce débat devrait préciser comment assurer simultanément la responsabilité démocratique des autorités et la protection contre les ingérences politiques dans l’exercice des poursuites.

Enfin, si des éléments du rapport peuvent paraître alarmistes, ils s’appuient sur des constats juridiques et des décisions internationales déjà intervenues. Leur mise en perspective mérite d’être examinée par les élus et les acteurs judiciaires avant qu’un éventuel basculement politique ne rende plus difficiles des réformes structurelles.

Parlons Politique

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