La France insoumise (LFI) se distingue sur la scène politique française par une pratique que ses dirigeants qualifient de « mouvementisme ». Ce positionnement consiste à soutenir, à intervalles réguliers, des mobilisations nées hors des cadres syndicaux et partisans, tout en affirmant une stratégie institutionnelle fondée sur la « révolution citoyenne par les urnes » et la non‑violence.
Un profil politique et stratégique
Ce « mouvementisme » est présenté par LFI comme un prolongement de son approche populiste de gauche. L’objectif affiché n’est pas simplement de créer des tensions dans la rue, mais de constituer un rapport de force populaire susceptible, à terme, de se traduire électoralement. Dans cette logique, le soutien aux mobilisations auto‑organisées apparaît comme un outil de construction d’une base sociale en dehors des circuits politiques traditionnels.
La tactique vise donc deux registres parallèles : la mobilisation dans l’espace public et la conquête des institutions par des moyens électoraux. LFI insiste sur la complémentarité entre ces registres et sur le refus déclaré de recourir à la violence.
Exemples récents cités par le mouvement
Le parti a soutenu des mouvements populaires récents, citant notamment le mouvement des « gilets jaunes » en 2018‑2019. Plus récemment, LFI a exprimé son appui à la journée « Bloquons tout » du 10 septembre, mobilisation que le parti présente comme caractéristique de l’auto‑organisation citoyenne.
Le choix de soutenir des actions nées hors des organisations classiques s’explique par la volonté de capter des énergies et des revendications qui échappent parfois aux structures institutionnelles. Cette posture permet aussi au parti de se positionner comme force d’appui aux colères sociales sans en revendiquer forcément le leadership formel.
Les déclarations de Jean‑Luc Mélenchon
Lors de l’émission « L’Evénement » sur France 2, jeudi 11 septembre, Jean‑Luc Mélenchon, leader de LFI, a déclaré : « C’est un devoir de s’insurger. » Il a ajouté, en citant implicitement Mao Zedong sans le nommer : « On a raison de se révolter. » Ces propos traduisent l’idée que la contestation populaire garde une valeur politique, même lorsqu’elle s’exprime hors des partis.
Deux jours plus tard, le 13 septembre, lors de la Fête de L’Humanité, Mélenchon a réaffirmé cette lecture : « Nous avons renversé deux gouvernements sans tirer un coup de fusil », a‑t‑il affirmé, attribuant ce succès à une « stratégie délibérée, voulue, choisie » reposant sur « l’action populaire auto‑organisée », « sans que les ‘insoumis’ n’aient le but d’en prendre la direction ». Ces formules soulignent la volonté de LFI de valoriser des mouvements populaires tout en se dissociant d’un contrôle direct de leur pilotage.
Les citations reproduites reflètent la manière dont le parti articule revendications de rue et ambitions institutionnelles. Elles éclairent aussi le rapport singulier que LFI entretient avec la mobilisation sociale : un soutien sans captation formelle.
Perspectives et limites de la stratégie
Sur le plan politique, ce mélange d’action de rue et de stratégie électorale comporte des avantages et des risques. Il permet d’élargir la base sociale et de capter des colères citoyennes non structurées. En revanche, il expose le parti aux critiques qui lui reprochent d’encourager des mobilisations imprévisibles ou de se dissocier des acteurs qui animent ces mouvements.
Enfin, LFI souligne la non‑violence comme principe, tout en reconnaissant l’importance d’un mouvement populaire auto‑organisé. Le parti insiste sur l’idée que soutenir des mobilisations n’implique pas nécessairement d’en diriger la trajectoire, mais plutôt d’en amplifier la visibilité et l’impact politique.
Sur le long terme, la tension entre autonomie des mouvements et visée électorale reste un élément central pour comprendre la posture de La France insoumise. Le « mouvementisme » y apparaît moins comme une tactique ponctuelle que comme un corollaire assumé de sa stratégie politique.