Michèle Lamont à l’EHESS : multiplier les messages pro-inclusion pour contrer le récit de Trump et élargir la reconnaissance des groupes marginalisés

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À l’EHESS, la sociologue Michèle Lamont (Harvard) a expliqué comment les « frontières symboliques » — démarcations culturelles et morales — restreignent la reconnaissance et entravent la justice sociale, et montré comment, dans Seeing Others, des récits et pratiques culturelles peuvent élargir la reconnaissance des groupes marginalisés. Elle annonce aussi un projet global, Recognition Globally, et analyse la « bataille culturelle » aux États‑Unis qui redéfinit qui mérite d’être reconnu.

Pour sa 44e conférence Marc‑Bloch, tenue lundi 8 décembre au Conseil économique, social et environnemental, l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) a invité Michèle Lamont, professeure de sociologie à Harvard. Canadienne et américaine, elle est connue pour ses travaux sur les « frontières symboliques » qui, selon elle, entravent la justice sociale.

Définition et portée des « frontières symboliques »

Michèle Lamont définit les frontières symboliques comme les démarcations par lesquelles un groupe s’identifie en interne et est identifié à l’extérieur. Il s’agit de lignes de démarcation culturelles et morales qui déterminent qui est reconnu comme digne d’appartenir à un espace social donné et qui en reste exclu.

Ces frontières ne sont pas uniquement juridiques ou matérielles : elles opèrent par la distribution de la reconnaissance, des stigmates et des représentations. Elles contribuent à légitimer des hiérarchies sociales et à rendre plus difficiles les demandes de justice pour les groupes marginalisés.

Les récits et les stratégies pour élargir la reconnaissance

Dans son dernier ouvrage, Seeing Others (Simon & Schuster, non traduit), Michèle Lamont décrit comment des acteurs culturels progressistes élaborent des récits et mettent en place des stratégies pour élargir la reconnaissance des groupes marginalisés. Son travail insiste sur l’importance des discours et des pratiques culturelles pour transformer les perceptions sociales.

Plutôt que de se limiter à des réformes institutionnelles, ces acteurs cherchent à modifier les critères mêmes de reconnaissance. Ils produisent des représentations, réinterprètent des stigmates et cherchent à déplacer les normes qui sous-tendent les exclusions. Selon Lamont, ces démarches passent par la construction de récits alternatifs et par des actions ciblées dans les sphères éducatives, médiatiques et artistiques.

Une réflexion prolongée à l’échelle mondiale

Michèle Lamont indique par ailleurs que cette réflexion sera prolongée dans son prochain ouvrage, Recognition Globally (titre annoncé). Ce projet entend élargir l’analyse au-delà des contextes nationaux et interroger comment la reconnaissance se construit et se négocie à l’échelle internationale.

La perspective globale promet d’examiner la circulation des modèles de reconnaissance et les tensions qui apparaissent lorsque des normes culturelles distinctes se rencontrent. Lamont semble ainsi situer la question de la reconnaissance à la croisée des dynamiques locales et transnationales, sans toutefois détailler dans le cadre de la conférence la méthodologie précise de ce futur travail.

La bataille culturelle aux États‑Unis

Interrogée par Le Monde, Michèle Lamont revient sur la « bataille culturelle » en cours aux États‑Unis. Elle y met en lumière des conflits de représentations et de valeurs qui nourrissent des controverses publiques sur l’identité, le mérite et la citoyenneté.

Pour Lamont, ces conflits culturels ne sont pas de simples débats d’opinion : ils participent directement à la redéfinition des frontières symboliques et influencent qui accède à la reconnaissance sociale. Les enjeux portent autant sur les politiques publiques que sur la capacité des sociétés à intégrer des récits capables de réduire la stigmatisation.

La conférence Marc‑Bloch de l’EHESS a ainsi offert l’occasion de réinterroger comment, par des transformations culturelles et discursives, il est possible d’ouvrir des espaces de reconnaissance plus inclusifs — une problématique que Lamont poursuit tant dans ses travaux récents que dans son prochain livre.

Parlons Politique

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