Le projet de loi de finances (PLF) 2026 présenté en conseil des ministres le mardi 14 octobre donne l’apparence d’un renforcement des moyens pour l’école : le budget de l’éducation nationale augmenterait de 200 millions d’euros par rapport à l’exercice précédent, pour atteindre 64,5 milliards d’euros, hors retraites des fonctionnaires (le « CAS pension », dans le jargon de Bercy).
Les chiffres mis en avant
Le document de synthèse adressé aux journalistes mentionne explicitement la création de 5 440 postes. Le PLF indique aussi que ce solde positif « intègre la baisse prévisionnelle du nombre d’élèves » ainsi que « les effets de l’entrée en vigueur de la réforme du recrutement et de la formation initiale », qui autorise les candidats à passer le concours à bac + 3. Le même texte évoque enfin des efforts « dans le renforcement de l’accompagnement médical et social des élèves ».
Analyse des lignes budgétaires : un bilan moins net
Une lecture plus fine des lignes de budget détaillé, disponibles à Bercy selon le texte, tempère toutefois l’impression d’une hausse nette des moyens. Ces documents montrent que, pour financer les créations annoncées et les mesures ciblées, l’éducation nationale comptera sur des suppressions de postes ailleurs dans le périmètre, en particulier chez les enseignants.
Autrement dit, le gain de postes affiché est partiellement compensé par des suppressions qui réduisent l’effet global sur les équipes éducatives. Le vocabulaire employé dans la synthèse – et repris par plusieurs interlocuteurs – qualifie ces annonces de « trompe-l’œil » ; cette formulation suppose que le chiffre global masque des transferts internes plutôt qu’une augmentation homogène des moyens.
La réforme du recrutement et ses effets
La réforme du recrutement et de la formation initiale, citée par le PLF, modifie le profil des candidats admissibles au concours en autorisant un accès à bac + 3. Le document souligne que l’entrée en vigueur de cette réforme produit des effets sur les prévisions d’emplois et sur les besoins de formation. Le PLF intègre ces effets dans son estimation des créations nettes.
Il reste cependant délicat, à partir du seul résumé transmis aux journalistes, de mesurer précisément comment la réorganisation des concours et de la formation pèsera sur le terrain, entre besoins en enseignants, disponibilités de formation et besoins d’accompagnement médical et social.
Conséquences possibles et zones d’incertitude
Plusieurs conséquences plausibles découlent de la stratégie budgétaire présentée, sans que le texte initial n’en détaille toutes les modalités. La diminution prévisionnelle du nombre d’élèves, rappelée dans la note, peut justifier une moindre dotation d’enseignants dans certaines académies. Simultanément, des moyens ciblés pourraient être redéployés vers des postes d’accompagnement médical et social, ou vers des dispositifs liés à la formation des nouveaux recrutés.
Ces réallocations soulèvent des interrogations : quelles catégories de postes seront précisément supprimées ? Comment seront réparties les créations annoncées entre académies et types de postes ? Le document synthétique ne livre pas ces précisions, et la consultation des annexes budgétaires de Bercy apparaît nécessaire pour en savoir plus.
Enfin, la référence explicite au « CAS pension » rappelle qu’une partie significative des dépenses liées aux retraites n’est pas comptabilisée dans la ligne budgétaire affichée, ce qui complique la comparaison avec les exercices précédents si l’on ne prend pas en compte l’ensemble des charges.
Sur la base des éléments fournis par le PLF et de la lecture des lignes de budget détaillé mentionnées, l’annonce d’une enveloppe supérieure de 200 millions et de 5 440 postes créés doit donc être traitée avec prudence. Le bilan net pour les équipes enseignantes et pour les établissements dépendra des arbitrages finaux, que seul le budget détaillé et sa déclinaison territoriale permettront de connaître précisément.