Ses mains triturent un stylo à bille noir. Légèrement penché en avant, il fixe l’agent d’accueil qui vérifie son dossier. Franck H., anorak noir sur le dos et crâne rasé, explique qu’il n’a plus d’allocation-chômage et qu’il est donc sans ressources.
Son dossier d’allocataire de la Caisse d’allocations familiales (CAF) a été clôturé et il ne sait pas pourquoi. Franck dit ne pas avoir su mettre à jour sa nouvelle adresse — il est hébergé chez une amie — ni indiquer sa nouvelle banque.
« C’est pas grave, on va faire votre demande de RSA [revenu de solidarité active] ensemble », le rassure l’agent d’accueil. Sous sa veste, les épaules de l’homme se détendent. Il esquisse un sourire en remerciant.
Un flux important et des motifs variés de venue
Comme quelque 1 500 personnes accueillies chaque jour dans l’agence de Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), ce quinquagénaire, perdu dans les démarches en ligne, est venu tenter de débroussailler son dossier.
Dans le hall d’accueil de cet immeuble impersonnel situé sur le mail de la ville, l’affluence est forte en ce matin de fin octobre. Quatre box disposés en marguerite permettent aux employés de la CAF de recevoir le public derrière une vitre en plexiglas, vestige de la période d’épidémie de Covid-19 que les agents en gilets bleus ont préféré conserver.
La grande salle verte résonne des voix qui exposent toutes sortes de cas : ouverture d’un dossier d’aide personnalisée au logement (APL), demande de prime d’activité, signalement d’un accident, déclaration d’une perte d’emploi ou annonce d’une naissance.
Difficultés d’accès et démarches numériques
La scène illustre la difficulté d’une partie du public à suivre des procédures désormais majoritairement numériques. Franck n’a pas su mettre à jour ses informations en ligne ; le résultat en a été la clôture de son dossier et la perte de revenus.
Sur place, les agents tentent de compenser ces ruptures par un accompagnement individuel. Ils saisissent des demandes, corrigent des coordonnées et expliquent les étapes à suivre pour stabiliser une situation administrative et financière.
Pour les allocataires, la compréhension du logiciel est souvent la clé du problème. Les raisons peuvent être diverses : changement d’adresse, modification des coordonnées bancaires, ou simple incompréhension des notifications envoyées par la CAF.
Un accueil entre réassurance humaine et contraintes matérielles
Le maintien des cloisons en plexiglas, héritage de la crise sanitaire, symbolise à la fois prudence et distance. Il protège les interactions mais souligne la configuration matérielle d’un service public en tension.
Les agents — en gilets bleus — exercent un travail d’équilibriste : apporter une aide administrative immédiate tout en gérant un flux quotidien important. L’intervention directe permet parfois d’éviter des ruptures de droits, comme la perte d’allocations ou l’interruption d’aides essentielles.
Franck repart avec la promesse d’une demande de RSA effectuée avec l’agent. Son soulagement est visible ; il reste cependant dépendant des suites administratives pour retrouver des ressources stables.
Sur le pavé du mail, d’autres personnes patientent, documents en main. Chacune porte une situation singulière, mais toutes partagent la même nécessité : réussir à traduire leurs événements de vie en données lisibles par un système administratif souvent exigeant.
La visite de l’agence de Rosny-sous-Bois montre combien l’assistance en présentiel demeure indispensable pour des allocataires confrontés à la complexité des démarches en ligne et aux conséquences financières immédiates d’une erreur ou d’une omission.




