Les syndicats et le patronat disposaient d’une opportunité pour démontrer qu’ils peuvent conclure des compromis plus rapidement que la classe politique. Douze mois après, le bilan est contrasté : plusieurs ruptures publiques et des désaccords majeurs ont fragilisé leur capacité à négocier au niveau interprofessionnel, alors que le premier ministre, Sébastien Lecornu, affiche sa volonté de s’appuyer sur ces acteurs pour nourrir des pistes de réforme.
Échecs visibles et moments clés
Le premier signal d’alerte est survenu à la fin juin avec l’échec du « conclave » sur les retraites, une tentative de parvenir à un compromis qui n’a pas abouti. Un second revers a eu lieu le 17 octobre, lorsque les représentants des salariés et des employeurs, chargés de gérer la caisse de pensions complémentaires Agirc-Arrco, n’ont pas réussi à s’accorder sur une revalorisation des prestations.
Ces épisodes ont été perçus comme des coups de tonnerre et ont alimenté le doute sur la faculté des partenaires sociaux à faire prévaloir le dialogue social. Ils interviennent au moment où le gouvernement souhaite amplifier le rôle des acteurs sociaux dans la conception des réformes, ce qui rend d’autant plus sensible la question de leur crédibilité politique et opérationnelle.
Des négociations entamées dans la confusion
La négociation sur les ruptures conventionnelles et les contrats courts, lancée le 3 décembre, illustre cette difficulté à s’organiser. La première réunion s’est déroulée sans la présence du Medef ni de l’Union des entreprises de proximité (U2P), ce qui a renforcé l’impression de flottement autour du démarrage des discussions.
La base même des échanges apparaît pour l’instant floue. Le patronat plaide pour une révision « de certains paramètres tels que ceux liés à l’indemnisation » des demandeurs d’emploi, formule qui vise à alléger, selon lui, le coût du système. L’objectif avancé par les organisations patronales est de « diminuer le coût annuel de l’assurance-chômage de 1 milliard d’euros », alors que l’exécutif réclamait initialement une économie de 400 millions d’euros.
Ces écarts de chiffrage et d’approche expliquent en grande partie les réticences des organisations de salariés, qui considèrent que la trajectoire proposée ne respecte pas les équilibres sociaux souhaités. Le rapport entre cible budgétaire et mesures envisagées reste au centre des tensions.
Conséquences et enjeux pour le dialogue social
À ce stade, les signes d’embellie peinent à apparaître. Les confrontations publiques et les désaccords sur les objectifs posent un défi concret : si les partenaires sociaux ne parviennent pas à stabiliser leurs méthodes de négociation, leur capacité à produire des solutions partagées pour des sujets structurants — retraites, complémentaire, chômage — reste limitée.
Pour le gouvernement, l’enjeu est double : tirer profit d’un dialogue social renouvelé sans se substituer aux partenaires, tout en maintenant une feuille de route budgétaire claire. Pour les organisations patronales et syndicales, il s’agit de retrouver des pratiques de négociation capables de concilier contraintes financières et exigences de protection sociale.
Les prochains rendez‑vous de la négociation permettront de juger si la dynamique peut être renversée. À court terme, la clarté des objectifs, la composition des tables de discussion et la transparence des chiffrages resteront des éléments déterminants pour restaurer une confiance minimale entre les acteurs.





