En cet après-midi du 10 juillet, le terminal T2 du port Édouard-Herriot, à Lyon, a vu s’animer un impressionnant ballet mécanique. Un portique a saisi, soulevé et déposé, un à un, des conteneurs bleus du groupe CMA CGM dans la cale du Zeus, un bateau long de 105 mètres.
Opération de chargement : rigueur et planification
Dans le jargon portuaire, ces « boîtes » sont disposées alternativement à bâbord et à tribord, empilées sur deux niveaux. Cette distribution obéit à un plan de chargement communiqué à l’avance, conçu pour ne pas déstabiliser l’embarcation.
La phase de manutention a duré environ une heure. À l’issue de l’opération, 36 conteneurs de grande capacité étaient arrimés dans la cale. Autant de camions qui n’emprunteront pas la route, souligne le constat immédiat de l’opération.
Départ et navigation : un trajet mesuré
Les moteurs du Zeus se sont mis à ronronner et Didier Blanchon, le pilote du bateau, a annoncé le départ depuis la passerelle. La capitainerie a répondu : « C’est noté, bonne navigation ».
La barge s’est éloignée du quai, a reculé jusqu’au centre du bassin puis a effectué un demi-tour précautionneux avant de prendre le cap plein sud, en direction du port de Fos‑sur‑Mer (Bouches‑du‑Rhône).
Le temps de parcours attendu est d’environ trente‑cinq heures, à une vitesse comprise entre 15 et 17 kilomètres-heure. « Ce qui compte, ce n’est pas la vitesse, c’est de savoir à quel moment vous arrivez. Un conteneur qui vient d’Asie, franchement, il n’est pas à deux jours près ! Ici, nous ne sommes pas dans le stress, nous assurons tranquillement la fiabilité et le volume du transport », explique M. Blanchon.
La précision du calendrier prime donc sur la rapidité brute. Pour ce convoi fluvial, l’enjeu est d’aligner horaires et capacités afin d’assurer la chaîne logistique en aval sans créer d’aléas.
Atouts du transport fluvial selon le pilote
Au terme de sa description, le pilote résume les bénéfices attendus : « Décarbonation, massification, fiabilité ». Chacun de ces termes renvoie, selon lui, à un objectif opérationnel distinct : réduire l’empreinte carbone, concentrer les volumes pour optimiser les déplacements et garantir la ponctualité des liaisons.
Sur le quai, la scène illustre une logique de massification : plusieurs unités de fret sont regroupées dans un même trajet fluvial plutôt que d’être dispatchées sur la route, ce qui limite, au moins à court terme, le recours aux camions pour ces 36 conteneurs.
Le choix de la voie d’eau répond aussi à une exigence de fiabilité logistique. À vitesse modérée, l’armement et les services portuaires peuvent synchroniser arrivées et déchargements avec moins de variabilité, remarque le pilote.
Une manœuvre maîtrisée, des implications claires
La scène observée au terminal T2 montre une opération standardisée, où chaque geste est programmé pour éviter les déséquilibres et optimiser la sécurité du navire. Les conteneurs empilés « sur deux niveaux », la répartition bâbord/tribord et le respect du plan de chargement illustrent cette maîtrise.
Sans prétendre à une analyse exhaustive de la filière, l’exemple du Zeus met en lumière des tendances concrètes du transport intérieur : transfert de charge vers les voies navigables, gestion anticipée des flux et priorité donnée à la continuité des approvisionnements plutôt qu’à la vitesse pure.
Sur la passerelle, les dernières paroles de M. Blanchon laissent transparaître l’approche pragmatique qui prévaut dans ces liaisons : la ponctualité et la capacité priment, au quotidien, sur l’urgence apparente.