Origines et ambivalences du mouvement
La mobilisation prévue le 10 septembre a suscité, cet été, de fortes interrogations parmi les organisations écologistes. Initiée sur des réseaux sociaux proches de l’extrême droite, la journée a ensuite reçu des soutiens provenant de mouvements de gauche, notamment La France insoumise de Jean‑Luc Mélenchon, ainsi que de certains syndicats.
Ce double ancrage idéologique explique l’ambivalence observée : plusieurs collectifs écologistes ont d’abord hésité, partagés entre la crainte d’une dérive du mouvement et l’opportunité d’y porter des revendications environnementales.
Le choix de la prudence exprimé par les organisations
Plusieurs organisations ont finalement exprimé leur soutien, parfois en annonçant une participation mesurée. « Nous allons y aller prudemment », résume Jean‑François Julliard, directeur général de Greenpeace France. Il ajoute que, « dans cette période très sombre pour les défenseurs de l’environnement, cela nous semble important de rappeler que l’on peut trouver une partie des solutions à la détresse des gens dans une transition écologique juste. »
La formule illustre le dilemme : soutenir une mobilisation large sans pour autant cautionner des méthodes ou des discours qui inquiètent. La prudence apparaît donc comme une posture partagée par des organisations désireuses de garder la main sur le contenu politique de leur présence.
Un appel collectif dans la revue Regards et les signataires
Plusieurs collectifs ont formalisé leur position en signant un appel publié dans la revue Regards. Greenpeace, Alternatiba, Extinction Rebellion, Action Justice Climat, ANV‑COP21 et la Confédération paysanne figurent parmi les signataires. L’appel vise à « amplifier et prolonger la mobilisation du 10 septembre », selon le texte cité par les signataires.
La signature conjointe de ces mouvements traduit une volonté de ne pas rester en marge du mouvement social. Elle témoigne aussi d’une stratégie : profiter de l’affluence pour influer, dans les assemblées générales, sur l’agenda et les priorités débattues.
Des mots d’ordre initiaux sans dimension écologique
Il est notable que les premiers mots d’ordre du mouvement ne contenaient aucune revendication explicitement écologique ou climatique. Cette absence a contribué aux réserves exprimées dans les milieux environnementalistes au début de l’été.
Cependant, la logique suivie par la plupart des militants consiste à intervenir localement, au sein des assemblées générales et des initiatives citoyennes qui naîtront le 10 septembre, afin d’y évoquer au moins ces enjeux environnementaux. L’objectif est d’introduire la question écologique dans un débat social plus large.
Stratégies, risques et limites
Pour les organisations signataires, participer ne signifie pas renoncer à de la vigilance. Le risque principal mentionné est celui d’une récupération politique ou d’une radicalisation de certaines actions, susceptible de détourner l’attention des revendications sociales et environnementales portées par ces associations.
Les signataires tentent donc de conjuguer deux impératifs : rester fidèles à leurs principes — notamment la promotion d’une « transition écologique juste » — et saisir une fenêtre d’opportunité médiatique et militante pour faire entendre leurs propositions.
À défaut d’un consensus total, la stratégie adoptée par ces collectifs reflète une lecture pragmatique : mieux vaut peser sur un mouvement large en restant présents qu’être absents et laisser la parole à d’autres acteurs.
Les débats internes et publics autour de la participation montrent que la question de la méthode est aussi politique que celle du fond. Le 10 septembre constituera, pour ces organisations, un test de capacité à articuler justice sociale et urgence climatique sans perdre de vue la nécessité de prévenir toute dérive idéologique.