Faure vs Glucksmann : rassembler la gauche

Un duel feutré à dix-huit mois de la présidentielle

À dix-huit mois de la présidentielle de 2027, ces rendez-vous ont mis en lumière une rivalité larvée et des choix stratégiques différents, alors même que les deux responsables affichent des lignes souvent proches. Les deux hommes se sont ainsi employés, selon les déclarations rapportées, à prôner le compromis, notamment vis-à-vis de Sébastien Lecornu. Ce point d’accord souligne une convergence ponctuelle, malgré des choix tactiques qui semblent se dessiner de façon autonome.

Le double calendrier — Faure à Trappes, Glucksmann à Pontoise — invite à lire ces rencontres à la fois comme des opérations de consolidation de bases militantes et comme des marques de positionnement en vue d’une échéance nationale. Chacun des meetings a mobilisé des alliances et des personnalités différentes, révèle une sensibilité propre sur la manière d’aborder l’électorat de gauche et le centre gauche, et permet d’observer des nuances sur l’agenda politique et la méthode.

Glucksmann à Pontoise : une réunion d’anciens ministres et un triptyque programmatique

L’eurodéputé Raphaël Glucksmann, peu visible dans les dernières semaines, avait répondu favorablement à l’invitation du mouvement porté par Bernard Cazeneuve, La Convention. Le rassemblement a pris des allures de réunion d’anciens responsables gouvernementaux, avec la présence d’anciens ministres de la présidence Hollande, dont François Rebsamen et Stéphane Le Foll.

Devant un public décrit comme plutôt âgé — environ 500 personnes avaient fait le déplacement —, Glucksmann, qualifié dans les comptes rendus de « presque candidat à la présidentielle de 2027 », a livré un triptyque qu’il considère essentiel pour l’emporter. Il a appelé à concentrer les efforts sur « la défense et la sécurité », sur « la transition énergétique » et à garantir « la cohésion sociale » par des investissements dans « la solidarité » et « la justice sociale ». Il a par ailleurs martelé que « la promesse faite aux travailleurs d’améliorer leurs conditions de vie » avait été trahie.

Ces axes mettent en avant une volonté de marier thèmes sécuritaires et transitions écologiques, tout en revendiquant un retour aux questions sociales traditionnelles de la gauche. Le profil des intervenants et l’assemblée mobilisée donnent à ce meeting une tonalité à la fois institutionnelle et tournée vers l’électorat des anciens responsables socialistes.

Faure à Trappes : alliances locales et ancrage à gauche

À Trappes, Olivier Faure a choisi un cadre différent, rapproché des Ecologistes et des militants issus de L’Après, mouvement issu d’anciens « insoumis ». La composition de cette alliance témoigne d’une stratégie d’élargissement vers des composantes écologistes et de la gauche radicale modérée, visant à rassembler des forces parfois concurrentes au sein d’un périmètre de gauche élargi.

Le format du meeting et le choix du lieu — une ville des Yvelines — signalent une volonté d’affirmer un ancrage territorial et d’entretenir des liens avec des courants qui ont pu se tenir à l’écart des courants plus institutionnels. Sur le fond, l’intervention d’Olivier Faure semble chercher à traduire une logique de rassemblement en profondeur plutôt qu’un appel direct à des figures issues des gouvernements précédents.

Sur le plan politique, cette juxtaposition de stratégies — l’une davantage construite autour d’anciens responsables nationaux, l’autre axée sur des alliances écologistes et des héritiers de l’expérience « insoumise » — laisse apparaître des modalités différentes de préparation d’une compétition présidentielle encore lointaine.

Si les convergences existent, elles cohabitent maintenant avec des divergences tactiques explicites. Les prochains rendez-vous et prises de parole permettront de préciser si ces options resteront complémentaires ou si elles feront rapidement l’objet d’un affrontement plus frontal au sein du paysage de la gauche française.