Le parti pro-européen Parti Action et Vérité (PAS) de la présidente Maia Sandu est arrivé en tête des élections législatives tenues dimanche 28 septembre en Moldavie, selon un décompte proche du définitif publié par la Commission électorale. Le scrutin, marqué par des accusations d’ingérence russe, oppose clairement deux trajectoires pour le pays : un approfondissement du rapprochement avec l’Union européenne ou un retour vers l’influence russe.
Résultats partiels et participation
Avec 94 % des bulletins dépouillés, le PAS recueillait 47,6 % des voix, contre 25,9 % pour le Bloc patriotique prorusse, précise le décompte achevé vers 0 h 15 (heure de Paris). En troisième position figurait le Mouvement alternatif national (MAS) du maire de Chisinau, Ion Ceban, avec 8,45 % des suffrages. Le MAS avait appelé à voter contre le PAS.
Le taux de participation s’est établi autour de 52 % des électeurs inscrits, un niveau proche de celui observé lors du précédent scrutin de 2021, où la participation avait été de 52,3 %. Ces chiffres confirment l’importance du vote pour une population d’environ 2,4 millions d’habitants, à laquelle s’ajoutent plus d’un million d’émigrés, également appelés à voter.
Analyses et formation du gouvernement
Pour Andrei Curararu, analyste du groupe de réflexion WatchDog, « statistiquement parlant, le PAS s’est garanti une fragile majorité ». Il estime toutefois qu’un « gouvernement fonctionnel sera difficile à former », évoquant des risques d’obstruction politique et d’actions visant à déstabiliser une majorité pro-européenne.
Curararu a ajouté s’attendre à ce que le Kremlin puisse « recourir à des manifestations, à la corruption des députés PAS et à d’autres tactiques pour perturber la formation d’un gouvernement pro-européen stable ». Ces propos reflètent l’inquiétude, exprimée par plusieurs acteurs, sur la stabilité politique après le scrutin.
Accusations d’ingérence et incidents signalés
La campagne électorale a été dominée par des accusations mutuelles de manipulation et d’intimidation. L’Union européenne a dénoncé une « campagne de désinformation sans précédent » attribuée à la Russie, allégation démentie par Moscou. De son côté, l’opposition prorusse a accusé le PAS d’avoir planifié une fraude.
Le service de cybersécurité moldave a indiqué, dimanche, avoir détecté plusieurs tentatives d’attaques sur l’infrastructure électorale, qui auraient été « neutralisées en temps réel ». Aucune preuve publique détaillée de l’impact de ces tentatives n’a été fournie dans le communiqué cité.
Après avoir voté à Chisinau, la présidente Maia Sandu a mis en garde contre « l’ingérence massive de la Russie », déclarant aux journalistes que son pays, voisin de l’Ukraine en guerre, était « en danger ». En début de semaine, elle avait dénoncé selon ses mots les « centaines de millions d’euros » investis par Moscou pour acheter des voix, orchestrer des campagnes en ligne et organiser des violences.
Réactions de l’opposition et mobilisation
L’ancien président Igor Dodon (2016-2020), figure éminente du Bloc patriotique, a revendiqué la victoire dès la fin du vote. Dans la soirée, il a appelé les partis d’opposition et des membres de la société civile « à une manifestation pacifique devant le parlement », lundi midi, « pour défendre le vote des citoyens ». Tenant un haut-parleur, il s’est ensuite rendu devant la commission électorale en menaçant de ne pas reconnaître le résultat « si, pendant la nuit, il y a des falsifications ».
La participation de la diaspora, qui avait déjà joué un rôle déterminant lors de la réélection de Maia Sandu en 2024, a fait l’objet d’une attention particulière. La région séparatiste de Transnistrie, favorable à la Russie, a également été scrutée : ses autorités ont accusé, dimanche, le gouvernement moldave de « nombreuses et flagrantes » tentatives visant à limiter le vote des habitants de cette zone.
Contexte et suites attendues
Près d’une vingtaine de partis et des candidats indépendants concouraient pour pourvoir 101 sièges au Parlement. En 2021, le PAS avait remporté le scrutin avec 52,8 % des voix, contre 27,2 % pour le Bloc des socialistes et communistes dirigé par Igor Dodon. Le recul relatif du PAS lors de ce nouveau scrutin est attribué, dans l’analyse publique, aux difficultés économiques persistantes du pays, l’un des plus pauvres d’Europe.
À court terme, les résultats partiels laissent présager des négociations difficiles pour la formation d’une majorité stable. Les différentes accusations portées durant la campagne, les alertes de cybersécurité et les mobilisations annoncées par l’opposition indiquent que la période post-électorale pourrait être tendue et décisive pour l’orientation future de la Moldavie.