Le 22 novembre 2025, cela fera deux ans que les électeurs néerlandais ont provoqué un séisme politique sans précédent dans leur pays. Pour la première fois, le Parti pour la liberté (PVV), formation emmenée par Geert Wilders, est arrivé en tête des élections législatives en raflant 37 des 150 sièges que compte la Seconde chambre.
Le séisme de 2023 et la montée du PVV
La victoire du PVV a marqué une rupture majeure avec l’ordre politique traditionnel, jusque-là dominé par des partis de centre et de droite. Longtemps considéré comme marginal, le courant nationaliste s’est rapidement imposé comme une force politique capable de peser au premier plan.
En quelques mois seulement, la participation de l’extrême droite au pouvoir — longtemps tenue pour taboue — est passée d’une probabilité à une réalité. Cette nouvelle configuration a mis à l’épreuve les équilibres parlementaires et les mécanismes de coalition propres au système néerlandais.
La coalition, la crise et l’impasse
Après sept mois de négociations, une coalition rassemblant le PVV de Wilders, le parti libéral-conservateur VVD, le parti centriste NSC et la formation rurale BBB a finalement vu le jour. Pour concilier les divergences, un Premier ministre « neutre », Dick Schoof — ancien dirigeant des services de renseignement — a été désigné pour diriger l’exécutif.
Le gouvernement a été officiellement investi le 2 juillet 2024. Mais cet édifice s’est rapidement avéré fragile. Le socle commun sur lequel les quatre partenaires s’étaient mis d’accord a été sans cesse attaqué, tandis que Geert Wilders, qui avait accepté de rester en dehors du gouvernement, a multiplié les provocations, testant la patience de ses alliés.
Le dossier de l’immigration et de l’asile, présenté par le PVV comme la priorité absolue, cristallise les tensions. Fin mai 2025, sans concertation avec les autres partis du gouvernement, le PVV a présenté un plan d’action visant à durcir drastiquement le droit d’asile — dix mesures, toutes plus radicales les unes que les autres, allant de la fermeture de frontières à des refoulements et rapatriements massifs. Ses partenaires ont jugé ces propositions contraires au droit européen et aux conventions internationales.
Le point de rupture a été atteint lorsque, refusant de revoir sa copie et dénonçant l’opposition des autres partis, Geert Wilders a annoncé le retrait de son parti de la coalition le 3 juin 2025. Minoritaire à la Seconde chambre, le gouvernement de Dick Schoof a alors été contraint de démissionner. Depuis, il assure la gestion des affaires courantes.
Un apprentissage pour le système de coalition
La crise, qui a plongé les Pays-Bas pendant près de cinq mois dans une situation inédite, a mis au jour les limites du modèle de coalition néerlandais lorsque l’extrême droite devient force dominante. Le compromis — clé du système — se heurte ici à l’intransigeance d’un leader et au caractère idéologique de certaines mesures souhaitées.
Plusieurs médias néerlandais ont souligné que la coalition ne pouvait pas résister longtemps à l’imprévisibilité du PVV et de Geert Wilders. L’expérience a aussi montré que l’extrémisme trouve difficilement un terrain d’entente avec la modération, même dans un pays réputé pour ses usages parlementaires de consensus.
Vers des élections anticipées et une incertitude persistante
Les électeurs néerlandais sont appelés aux urnes le mercredi 29 octobre pour des élections législatives anticipées. À quelques jours du scrutin, un sondage réalisé le 24 octobre traduit une forte incertitude: cinq formations sont au coude-à-coude.
Parmi elles figurent le PVV (extrême droite); la coalition entre la gauche et les écologistes (GL-PvdA) emmenée par l’ancien commissaire européen Frans Timmermans; D66 (libéraux); le CDA (chrétiens-démocrates); et le VVD (conservateurs). Ces cinq formations recueillent, selon le sondage, entre 10 % et 17 % d’intentions de vote.
Reste à savoir qui arrivera en tête lors du scrutin, voire en seconde position. Si le PVV devait remporter de nouveau les élections législatives, toutes les formations ont d’ores et déjà déclaré être formellement exclues de former une coalition avec Geert Wilders, y compris le VVD, que Wilders juge « totalement peu fiable ».
Dans ce contexte, une coalition devrait probablement se constituer autour du parti arrivé en deuxième position. Après le scrutin, les députés désigneront d’abord un « informateur » chargé d’examiner les alliances potentielles. Lorsqu’une coalition viable sera identifiée, un « formateur », généralement issu du parti arrivé en tête parmi les futurs partenaires, entamera les négociations pour bâtir un accord.
Cependant, à l’image du dernier gouvernement qui a mis sept mois à se constituer, le prochain processus pourrait également nécessiter un certain temps avant de se dessiner.




