Le Premier ministre bulgare Rossen Jeliazkov a annoncé sa démission ce jeudi 11 décembre. Sa décision intervient au lendemain de manifestations massives à travers le pays, rassemblant des dizaines de milliers de Bulgares, dont environ 100 000 personnes à Sofia, pour dénoncer la corruption au sein de l’appareil d’État.
Une annonce en pleine mobilisation citoyenne
Devant la pression populaire, M. Jeliazkov a déclaré : « Nous entendons la voix des citoyens qui protestent contre le gouvernement ». L’annonce est intervenue peu avant qu’un nouveau vote de confiance — le sixième depuis janvier, date de son arrivée au pouvoir — ne soit soumis au Parlement.
Le Premier ministre démissionnaire a estimé que, lors du prochain vote de confiance, le gouvernement recevra du soutien. Il a ajouté que « les décisions de l’Assemblée nationale n’ont de sens que lorsqu’elles expriment la volonté du souverain ». Agé de 57 ans, il a choisi de prendre la parole pour formuler cette sortie politique au sommet d’une crise naissante.
Les raisons de la colère : budget et méfiance
La tension avait augmenté ces derniers jours autour du budget 2026 présenté par le gouvernement. Ce projet prévoyait notamment une augmentation des impôts, un relèvement des cotisations de sécurité sociale et une hausse des dépenses publiques. De nombreux Bulgares ont perçu certaines hausses comme des moyens de dissimuler des détournements de fonds.
Face à la mobilisation, le gouvernement avait finalement retiré son projet de budget le 3 décembre. Ce retrait ne s’est toutefois pas avéré suffisant pour apaiser la crise et une partie de la population a continué de réclamer davantage de transparence et de responsabilité.
Le mouvement national, porté notamment par la jeunesse bulgare, a pris de l’ampleur et a mis en lumière, au-delà du seul budget, le sentiment d’une influence oligarchique persistante sur la vie politique du pays.
Le rôle des forces politiques et des personnalités
Les manifestations ont également ciblé l’influence de certains acteurs politiques. Delyan Peevski, homme politique rattaché au « Mouvement pour les droits et les libertés (DPS) » et accusé en 2021 par la justice américaine de corruption, cristallise une partie de ces tensions. Ayant déjà exercé une influence sur des gouvernements précédents, son parti joue aujourd’hui un rôle clé dans l’équilibre parlementaire.
Plus largement, les protestataires dénoncent un système politique qui, selon eux, favorise des réseaux d’influence et freine le renouvellement démocratique. Ces critiques expliquent en partie l’ampleur et la persistance du mouvement.
Quel calendrier politique ?
Après l’annonce de la démission, un vote officiel sur la démission du gouvernement doit avoir lieu lors de la prochaine session plénière du Parlement, où la coalition détient toujours la majorité. Le président bulgare Rumen Radev est désormais tenu d’inviter les partis parlementaires à tenter de former un nouveau gouvernement.
Si aucun accord n’est trouvé, ce qui est présenté comme probable dans le contexte actuel, le président devra alors nommer un gouvernement intérimaire pour diriger le pays jusqu’à l’organisation de nouvelles élections.
Contexte européen et enjeux économiques
Cette crise politique survient à un moment charnière pour la Bulgarie. Le pays est la plus petite économie de l’Union européenne et doit devenir, le 1er janvier 2026, le 21e membre de la zone euro. Dans ce contexte, l’instabilité politique soulève des interrogations sur la capacité des autorités à mener à bien ce calendrier et à rassurer les partenaires européens.
Un sondage national réalisé en juin 2025 indiquait que 46,8 % des citoyens bulgares étaient opposés à l’adhésion à la monnaie unique, craignant notamment un risque d’inflation lié à ce changement. Selon l’article, un message diffusé par la propagande russe viserait à éroder encore le soutien populaire à l’euro, alimentant les divisions internes.
Début d’une crise politique majeure, cette séquence pèse sur la trajectoire de la Bulgarie à la fois sur le plan institutionnel et économique. Les prochains jours, entre débats parlementaires et tentatives de formation d’un exécutif, détermineront l’ampleur et la durée de l’instabilité.





