Serge Andrieu soupire et corrige une idée reçue qui revient régulièrement dans les reportages : « A force de voir des journalistes venir pour dire “Carpentras va basculer au RN” [Rassemblement national], tout le monde croit qu’on est RN… Mais la ville ne l’a jamais été ! »
Une rumeur tenace
La rumeur d’un basculement politique à Carpentras pèse depuis plusieurs années. Le maire (divers gauche) se voit fréquemment contraint de démentir publiquement cette image. Selon lui, la confusion vient en partie d’un lien territorial : « C’est parce que la petite Maréchal a été élue dans la circonscription », suppose l’édile. Marion Maréchal a en effet été députée RN de la 3e circonscription du Vaucluse entre 2012 et 2017.
Les services municipaux rapportent eux aussi cet épuisant exercice de clarification. Les apparences, alimentées par des analyses médiatiques et des chroniques politiques locales, donnent parfois l’impression d’un glissement politique attendu, alors que les urnes de la commune n’ont pas couronné le Rassemblement national.
Les municipales de 2020 : un scrutin serré mais défavorable au RN
Lors des élections municipales de 2020, le RN n’a pas présenté de tête de liste estampillée. Le parti a soutenu un candidat sans appartenance formelle, Bertrand de La Chesnais, ancien général et ancien numéro deux de l’armée de terre.
Au second tour, Bertrand de La Chesnais a réuni 39,18 % des suffrages, contre 45,82 % pour Serge Andrieu, qui a ainsi conservé la mairie. Le candidat Les Républicains (LR), Claude Melquior, qui s’était maintenu, a obtenu 15 % des voix. Bertrand de La Chesnais se souvient d’avoir appris sa défaite avec « stupeur ».
Ces résultats montrent que, même lors d’un scrutin compétitif et marqué par la présence d’un candidat soutenu par le RN, la majorité relative des électeurs de Carpentras a fait le choix de maintenir l’équipe municipale sortante.
La stratégie locale et les postures publiques
Interrogé sur l’éventualité d’un affrontement futur avec l’extrême droite locale, le maire use de l’humour pour tempérer les rumeurs : « Maintenant que le RN est enfin tenté de prendre Carpentras, plaisante-t-il, il vaut mieux que je reste pour leur faire barrage… Bon, c’est la galéjade », précise-t-il prudemment.
Cette formule illustre la double nécessité pour l’exécutif municipal : d’une part, déminer les interprétations hâtives sur l’identité politique de la ville ; d’autre part, maintenir une présence claire face à des adversaires perçus comme déterminés. Les déclarations publiques servent ainsi autant à convaincre les électeurs qu’à répondre aux interrogations des médias.
Sur le terrain, les acteurs locaux — élus, agents municipaux, et représentants d’associations — continuent de constater les effets concrets de ces polarisations : une attention accrue des journalistes, des questions répétées des habitants, et parfois une tonalité anxiogène dans le débat public.
Une municipalité déterminée à garder le cap
Serge Andrieu et son équipe affichent la volonté de poursuivre leurs projets et de préserver, selon eux, le caractère républicain et pluraliste de la commune. La mémoire du scrutin de 2020 reste un repère : elle atteste que, même face à une candidature soutenue par le RN, la majorité municipale a su mobiliser suffisamment d’électeurs pour conserver la mairie.
À Carpentras, la lecture de l’échiquier politique local exige de distinguer les dynamiques nationales des réalités municipales. La proximité des élus avec les administrés, les enjeux quotidiens de gestion et les biographies locales des candidats semblent peser fortement lors des scrutins.
En l’état des éléments publics cités ici, la ville n’est pas passée au Rassemblement national. Les déclarations du maire, les résultats chiffrés de 2020 et les commentaires des protagonistes constituent les repères vérifiables de cette situation politique locale.





