Samedi 23 août, la mairie de Saint-Raphaël (Var) a inauguré ce que les élus locaux présentent comme le premier monument français dédié aux « victimes du communisme ». L’initiative, portée par le maire Frédéric Masquelier (Les Républicains), a suscité une vive opposition de la part de responsables et élus de gauche qui dénoncent un amalgame historique et politique.
Un symbole sculptural et son emplacement
Le monument représente un homme repoussant deux blocs monumentaux. Il a été installé à proximité immédiate d’une stèle existante, dédiée aux martyrs de la Résistance, parmi lesquels figuraient de nombreux communistes. Ce choix d’emplacement a été au cœur des critiques : pour ses détracteurs, il donne l’impression d’une mise en regard contestable entre des victimes d’idéologies et des résistants tombés pour la France.
Les responsables municipaux ont défendu l’œuvre comme un hommage aux victimes du communisme, tandis que plusieurs élus de gauche ont jugé l’équation historique inappropriée. Une citation marquante de l’un des opposants résume la tonalité des échanges : « le nazisme et le communisme (…) sont les deux faces d’une même pièce funeste ». Cette formule a contribué à envenimer le débat autour de la cérémonie.
Une inauguration à tonalité politique
La cérémonie, organisée le soir même par l’équipe municipale, devait se vouloir rassembleuse. Elle s’est tenue alors que la période de réserve électorale précédant les élections municipales de 2026 débutera le 1er septembre, période pendant laquelle la communication des élus est encadrée. Plusieurs observateurs ont noté que l’événement a pris des allures de meeting politique.
Face au soleil couchant, des rangées de chaises avaient été disposées pour accueillir le public. Des centaines d’adhérents, certains coiffés de casquettes à l’effigie de la mairie, occupaient les places. Autour d’eux, des membres du personnel municipal, vêtus de polos, s’affairaient à la logistique et à la préparation d’un cocktail offert à la suite de la cérémonie. L’ensemble a attiré l’attention de promeneurs et de baigneurs en maillot de bain, intrigués par les barrières de sécurité et par l’ampleur du dispositif.
Controverses et enjeux mémoriels
Le débat déclenché par l’inauguration illustre la difficulté de traiter, dans l’espace public, des mémoires concurrentes et des symboles politiques. Pour certains élus de gauche et une partie du public, rapprocher une stèle commémorative des résistants — où figurent des communistes morts pour la lutte contre l’occupant — d’un monument consacré aux « victimes du communisme » relève d’une instrumentalisation politique de la mémoire.
De leur côté, les promoteurs du monument insistent sur l’idée d’un « devoir de mémoire » élargi, entendue comme la reconnaissance de toutes les victimes de régimes communistes. La formulation et la mise en scène ont néanmoins nourri l’émotion et les oppositions, notamment parce qu’elles s’insèrent dans un contexte politique local et national tendu.
Plusieurs représentants de gauche ont exprimé publiquement leur désaccord, estimant que la comparaison entre nazisme et communisme pouvait banaliser des réalités historiques distinctes. Les débats portent autant sur le sens symbolique du monument que sur la manière dont la ville a choisi de l’installer et de l’inaugurer.
Sur le plan pratique, l’événement a été marqué par une organisation municipale importante et par la présence visible de partisans locaux. L’effet de mobilisation a contribué à transformer une inauguration commémorative en manifestation politique à dimension locale.
En l’état, la polémique pose des questions plus larges sur la façon dont les collectivités choisissent de commémorer des événements et des victimes, et sur la manière dont ces choix résonnent dans une vie politique déjà marquée par des divisions. Les débats suscités par cette inauguration témoignent d’un affrontement entre visions concurrentes de la mémoire et de l’espace public, qui pourrait se prolonger dans les semaines à venir.