La députée La France insoumise (LFI) Sophia Chikirou a annoncé officiellement sa candidature à la mairie de Paris le vendredi 14 novembre, se présentant comme la figure d’un « Paris populaire » et excluant toute alliance avec la majorité socialiste sortante pour battre la candidate de droite Rachida Dati.
« Le mandat de député est passionnant, mais il y a une énorme frustration de ne pas arriver à répondre aux demandes des gens », a déclaré Mme Chikirou à l’Agence France‑Presse (AFP). Investie par le mouvement de Jean‑Luc Mélenchon pour conduire la liste aux municipales de mars 2026, elle était la seule candidate à ce poste d’investiture.
Un positionnement affirmé et des clivages
Âgée de 46 ans et proche de Jean‑Luc Mélenchon, Sophia Chikirou affirme vouloir rompre avec le bilan de la maire socialiste Anne Hidalgo, en poste depuis 2014. Elle multiplie les formules destinées à marquer cette rupture, y compris des attaques sur le style de gouvernance: « Je ne m’achèterai pas de robes à 6 000 euros », a‑t‑elle lancé en référence à la polémique autour des notes de frais de l’édile.
La députée revendique aussi de défaire une image qu’elle juge injuste: « On va redécouvrir Sophia Chikirou. J’ai laissé pendant des années des adversaires politiques et médiatiques salir mon image. Je suis l’opposé de ma caricature. » Ce discours s’inscrit dans un contexte où sa personnalité est jugée clivante, y compris à gauche.
Controverses et mise en examen
Le parcours de Mme Chikirou comporte des prises de position controversées: cet été, elle a déclaré ne pas considérer la Chine comme une dictature et a publié un message comparant le dirigeant du Parti communiste Fabien Roussel à Jacques Doriot, figure historique passée à la collaboration. Ces propos ont alimenté les débats sur son positionnement.
Sur le plan judiciaire, elle est mise en examen, notamment pour « escroquerie aggravée » relative aux comptes de campagne du candidat à la présidentielle de 2017, des faits qu’elle conteste. « C’est une frustration d’être mise en examen à tort, mais ce n’est pas un problème politique », a‑t‑elle déclaré, minimisant l’impact politique de cette procédure.
Propositions et priorités de campagne
Au cœur du programme qu’elle présente figure la réduction du coût du logement. « Quand les familles parisiennes sont obligées de partir parce que se loger est trop cher, c’est que les politiques mises en place ne répondent pas à leurs besoins », affirme la candidate, ciblant ainsi une problématique partagée par une large partie de l’électorat parisien.
Elle propose également la mise en place d’une « éducation communale » qui passerait par un investissement massif en faveur des animateurs du périscolaire, actuellement en grève pour dénoncer la « précarisation » du secteur. Mme Chikirou se démarque par là de certains responsables municipaux qui mettent en avant les limites d’action de la mairie face à l’État: « Je ne serai pas Anne Hidalgo, David Belliard ou Ian Brossat qui disent que la mairie ne peut rien faire, que c’est la faute de l’État. »
La candidate compte aussi sur des évolutions institutionnelles pour renforcer la représentation de son camp: elle évoque la réforme dite PLM (Paris‑Lyon‑Marseille), qui permettrait d’élire directement les conseillers de Paris sans passer par le filtre de l’arrondissement.
Organisation de campagne et enjeux électoraux
Pour dynamiser sa campagne de terrain, Mme Chikirou annonce que, dès le week‑end suivant son lancement, 5 000 militants « insoumis » seront mobilisés pour tracter dans les arrondissements de gauche afin d’« faire progresser la participation ». Les équipes locales affirment avoir déjà désigné des têtes de liste dans les 17 arrondissements, dont l’ancien auteur des Guignols Bruno Gaccio dans le 7e, un arrondissement tenu par Rachida Dati.
Un sondage récent créditerait la candidate de 12 % des intentions de vote au premier tour, niveau que l’équipe présente comme suffisant pour se maintenir au second tour. Mme Chikirou rappelle que LFI n’a aujourd’hui aucun élu au Conseil de Paris, mais espère tirer parti de ses performances lors de la présidentielle de 2022 et des européennes de 2024 dans certains quartiers.
Sur les alliances, la stratégie est claire: comme à Marseille et Lyon, les « insoumis » partiront au premier tour indépendamment du reste de la gauche. Interrogée sur une éventuelle alliance au second tour si elle franchit la barre des 10 %, la députée laisse la porte ouverte aux écologistes menés par David Belliard, mais exclut toute alliance avec le candidat socialiste Emmanuel Grégoire, qu’elle cite pour s’opposer à toute discussion avec LFI.
Le maintien d’une liste LFI au second tour pourrait, selon les acteurs politiques, fragiliser les chances d’une union de gauche capable de conserver la capitale, alors que les sondages placent la candidate Les Républicains Rachida Dati en position favorable.





